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DE MARBRE

Feu sacré

Les Lyonnais de DE MARBRE, à travers un premier album remarquable, Feu de veines, rejoignent le sillon tracé par une nouvelle génération de groupes post-punk (Varsovie, Versari…) qui réussit avec brio à redéfinir les contours du genre en empruntant à d’autres musiques comme le métal ou le noise, tout en apportant un soin particulier à l’écriture des paroles.

Entretien avec Ephts Ohm, alias Stéphane, le frontman du groupe.

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Vous vous êtes formés en 2019, vous avez eu une vie avant ?

J’ai fait partie de plusieurs groupes, notamment de post-punk puis électro indus. Les autres, c’est pareil, ils ont joué dans des groupes métal… il y a un peu de tout.

Vous chantez en français, ce qui n’est pas si courant que cela….

J’y tiens vraiment même si ce n’est pas évident. Je peux aussi chanter en anglais notamment parce que c’est plus facile qu’en français. Chanter en français demande une exigence au niveau des textes. Je cherche quelque chose d’assez concis. Il y a beaucoup de groupes qui pour moi ne se sont pas détachés de la chanson française, il y a un poids parce que l’on a une super chanson française. Il faut trouver autre chose, faire du Léo Ferré sur du rock, moi ça me soule un peu. Je pense qu’il faut plus aller chercher dans un côté scandé. Ce qui m’a donné envie de chanter en français, ce sont les deux premiers albums de The Young Gods. Quand j’ai entendu ça, ça faisait partie des premières choses que j’entendais chantées en français et ça m’a subjugué.

Quels sont les thèmes que tu abordes ?

Je suis un voleur, comme beaucoup de gens qui écrivent. Feu de veines est très influencé par Misérable miracle d’Henri Michaux dont j’ai repris des formules que j’ai mélangées. C’est difficile de choisir ses sujets. Parfois, pour les sujets personnels, je me planque derrière l’anglais, comme sur 2 chansons du disque qui ne sont pas en français, “Sillon” et “You’re the ghost”. Sinon, c’est trop dur à chanter parce que trop personnel. Au delà de cela, on aborde des sujets sociétaux parce que cela me tient à cœur, je fonctionne par images. Je n’aime pas le côté donneur de leçons ou qu’on me dise ce que je dois penser. Par exemple, “Idole invisible” c’est sur l’aliénation au travail, le poids du management. Là encore ça vient d’un livre. J’utilise beaucoup ce que je lis. Je donne un avis mais en essayant d’avoir un regard d’angle plutôt que d’être frontal, même si on comprend facilement où je veux en venir.

Parlons de vos influences. Vous définissez musique comme “Darkédélic”, vous citez Cure, Killing Joke, le noise…

Quand on a monté le groupe, au début je voulais faire de l’électro, de l’EBM. Mais j’avais aussi pas mal de morceaux de post-punk dans mon ordinateur, datant d’une période précédente. Mais, pour te répondre sur les influences, ce que j’écoute chez moi c’est vraiment très large : de la musique expérimentale, du free jazz, de la musique symphonique, de l’indus… Édouard, au clavier et à la basse VI, lui vient plutôt du milieu noise, math rock. Il avait des groupes fusion dans le temps. Je pense que les rythmiques un peu style Rage Against The Machine ça vient de lui. Loup Langlade, qui joue de la basse dans le groupe, vient plutôt du metal même s’il a une bonne connaissance du post-punk. Le batteur, Émile Casas, lui est plutôt influencé par le shoegaze, le punk et le stoner, des choses assez sombres avec de la saturation. Ils viennent d’environnements très différents, aussi mes démos de post-punk s’enrichissent-elles avec ces musiciens au moment de faire les arrangements. On sort vraiment les morceaux à 4, sans que j’impose quoique ce soit. C’est peut-être ça qui donne un côté metal.

Feu de veines est autoproduit, c’est un choix ?

Non, je cherche actuellement, mais en fait on cherche tout ! Je suis un peu impatient, on a fait quelques super concerts. On a pas mal de route à faire encore, on a pris notre temps pour faire l’album, dans une période facile pour personne. Pour la production, on a été aidés par David Champey qui a orienté le son vers quelque chose à la Killing Joke, qui colle parfaitement à nos compositions.

Quelle est ton ambition pour le groupe ?

On cherche évidemment à évoluer et à grossir, on verra bien où ça nous mène. On est déjà en train de bosser sur le deuxième album tout en continuant à tourner en même temps. Sur scène on joue déjà 4 titres qui ne sont pas sur Feu de veines qui, malgré tout, n’a que 3 mois et que l’on va continuer à exploiter. On a tellement de choses à faire !

Entrevue : Xavier-Antoine MARTIN

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Feu de veines – Autoproduit

Les nappes profondes qui enveloppent les premières mesures du disque  donnent une indication assez claire sur l’atmosphère générale inspirée par un post-punk d’obédience Killing Joke. La première piste, “Digital pourpre”, installe ainsi un climat sombre que le chant, avec ses paroles anxiogènes en français, ne fait qu’accentuer. Le ton se durcit même avec “Idole invisible” qui a du mal à cacher ses influences metal et noise, tout comme la grande majorité des titres qui lui succèdent (l’intro de “New moment” fait même plus qu’un clin d’œil à Rage Against the Machine). Au milieu de ce déferlement d’énergie noire qui accélère crescendo le flux sanguin créant ce feu de veines auquel le nom du disque fait directement référence, quelques titres au tempo plus lent permettent de reprendre un semblant de respiration, comme “Sous verre”, “You’re the ghost” et surtout “Sillon”, pièce musicale qu’Howard Devoto n’aurait certainement pas reniée. Tout ceci avant que le morceau éponyme à l’album ne vienne refermer ce premier chapitre discographique, titre mené tambour battant pendant plus de 7 minutes et preuve ultime du talent d’un groupe à découvrir sans tarder.

Lien d’écoute : https://demarbre1.bandcamp.com/album/feu-de-veines-3

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