Bandeau Longueur d'Ondes n° 101

FLORENT MARCHET

Toujours plus près des étoiles

 

Maisons-Alfort revisite le sublime répertoire de Florent Marchet sous une forme acoustique, accompagné d’un simple piano et de quelques cuivres. Après le splendide Garden Party l’an dernier l’auteur-compositeur semble avoir atteint le firmament de sa carrière.

 

 

Maisons Alfort cette année, Garden Party l’an dernier, Florent Marchet est très actif après de longues années sans albums : « On en parle peu mais entre Bambi Galaxy et Garden Party j’ai fait Frère Animal qui a donné un spectacle sur l’extrême-droite au moment des élections de 2017. J’ai aussi travaillé sur des scénarios de films qui ne se sont pas faits, notamment une comédie musicale sur laquelle j’ai travaillé un an et demi. Le cinéma encore davantage que la musique est une industrie. J’ai aussi sorti un roman. Le temps d’écriture d’un livre est un travail au long cours. Cela prend deux ans au bas mot. »

Florent Marchet est un artiste à part qui au cours de sa carrière est passé d’un univers à un autre, la musique, bien sûr, pour lui, pour d’autres, la littérature, les musiques de films : « J’aime avoir un parcours qui ne soit pas balisé. Ce que je risque de ne plus faire à l’avenir, c’est la réalisation pour d’autres. J’ai aimé le faire mais je trouve ça chronophage. La réalisation c’est intéressant mais cela prend un temps infini. On est au service de l’autre. C’est bien mais pendant ce temps on ne fait pas assez de choses pour soi. Je ne me plains pas, j’ai pu grâce à cela aller dans de supers studios comme Abbey Road ou je ne retournerai peut-être jamais. Je ferai peut-être encore des musiques de films dans le futur mais j’ai un problème avec l’idée de commande. Je ne pourrai jamais faire de la musique de pub mon activité principale. Je l’ai fait. Cela m’a permis d’avoir quatre mois d’écriture de roman devant moi mais ne faire que cela est totalement inenvisageable. Être écrivain, se dire je n’ai qu’à écrire, c’est le luxe absolu. »

 

Florent a toujours été imprégné depuis son plus jeune âge par la littérature dans une maison où le livre était tout et la télé rien : « La littérature a sauvé ma famille. Mon père aurait sûrement été travailler à l’usine s’il n’avait pas découvert la littérature. Les livres ont toujours été présents à la maison. Chez moi il fallait lire et je voyais le monde des écrivains comme un monde inaccessible. Je ne lisais que les grands auteurs et cela m’impressionnait. Avec la musique c’était plus simple car vu qu’il y avait plein de choses pas géniales c’était moins intimidant. Arnaud Cathrine avec qui je suis ami n’avait pas ce complexe car il avait commencé avec les romans de gare. »

 

« Je n’avais pas les codes des hautes sphères intellectuelles quand j’étais ado mais la rencontre que j’ai eu avec Albert Jacquard a tout changé car cet homme regardait l’autre avec intérêt. J’aime l’écriture car je peux revenir dessus. C’est pour cela que pendant longtemps j’étais mal à l’aise avec les interviews ne pouvant changer ce que j’avais dit. À quarante ans j’ai réalisé que la vie est extrêmement courte et j’ai eu envie de prendre du temps pour moi en faisant ce dont j’avais vraiment envie. C’est pour cela que je n’ai pas écrit de chansons pendant un moment. Pour Garden Party , j’ai fait les choses sans la moindre pression car il n’y avait pas la nécessité d’écrire de morceaux. Durant le confinement j’ai regardé le monde à l’arrêt et j’ai eu envie d’écrire ça en chansons. Je ne l’ai pas fait dans l’optique d’un album mais quand tu as six morceaux ça tend obligatoirement vers ça. »

 

Garden Party, son album sorti l’an dernier est un disque qui nous touche au plus profond et nous bouleverse. Florent Marchet est un nouvelliste de grand talent capable avec un texte court de sonder l’âme humaine comme rarement auteur ne l’a fait : « La chanson prend peu de risques. En littérature on parle souvent de la famille, dans la chanson rarement car celle-ci est consensuelle. La vie c’est du rire et des larmes, cela ne devrait pas être que du divertissement. Quatre-vingt-quinze pour cent de la chanson aujourd’hui est malheureusement dans ce registre. »

 

Il y a un côté naturaliste à la Zola chez Florent Marchet, tant l’auteur s’inscrit dans le réel décrivant avec une justesse rare l’homophobie ordinaire dans “Paris-Nice” ou les violences faites aux femmes dans “Comme il est beau” : « Je veux toujours le décor tel qu’il est sinon je ne peux pas décrire les choses. Je détourne parfois car je parle de gens réels mais pour le décor je ne détournerai jamais. »

« Toutes les histoires que je raconte dans Garden Party sont vraies. Tous les textes de l’album content une seule et même histoire. J’ai toujours fonctionné comme cela. Pour ce disque j’ai écrit en glanant les observations faites dans mon quartier résidentiel de Maisons-Alfort. C’est en promenant mon chien et en regardant tout ce qui se passait autour de moi que petit à petit ce terrain de jeu d’écriture s’est formé. Plus que chanteur engagé je me sens comme un chanteur concerné. Je suis gêné par ce côté tout va très bien que l’on voit dans nos sociétés. »

 

Depuis la sortie de cet album et aujourd’hui avec celle de Maisons-Alfort l’artiste n’arrête pas de tourner : « Avant même que Garden Party ne paraisse on a commencé petit avec des endroits pas bien grands et même chez des particuliers. J’aime partager mes chansons avec des gens. Je ne me suis jamais senti aussi bien sur scène que durant cette tournée. Physiquement je suis en accord avec mes chansons. Je n’ai jamais été aussi heureux de faire des bornes dans un camion. »

 

Entrevue : Pierre-Arnaud JONARD

 

Photos : Marie ROUGÉ

 

Maisons Alfort – Nodiva

 

Florent Marchet sera en concert au Trianon le 27 Novembre prochain

 

ARTICLES SIMILAIRES