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FRED NEVCHÉ & LOU

Si The unreal story of Lou Reed ne devait être à la base qu’un spectacle, on est plus qu’heureux que leurs auteurs aient décidé de le sortir en disque. Fred Nevché et French 79 nous offrent avec cet opus une lecture poétique et littéraire fascinante de la transgression chez le New-Yorkais. Entretien avec Fred Nevché.

 

Ce travail sur Lou Reed poursuit ce que tu avais fait sur Prévert et sur Marilyn Monroe – Kurt Cobain ? 

« Ce nouveau travail est le fruit d’une rencontre. Le Festival havrais le Gôut des Autres avait aimé mon travail sur Monroe – Cobain. Ils avaient programmé une édition New York chez eux. La programmatrice m’a proposé de faire quelque chose autour de Lou Reed. J’ai pensé à faire un travail imaginaire sur lui. Lou Reed a créé des chansons universelles. J’avais envie d’offrir quelque chose d’émouvant. J’ai travaillé là-dessus avec French 79. »

Qu’est ce qui t’intéresse dans les figures de Prévert, Marilyn Monroe, Kurt Cobain ou Lou Reed ? 

« Les icônes de la pop culture interrogent le monde d’aujourd’hui. Monde dans lequel on assiste à un retour du puritanisme et où existe un vrai problème de racisme. Tout cela rentre dans les réflexions que je me fais. J’aime l’idée qu’il y a au fond de ses œuvres quelque chose d’intemporel. Quelque chose qui éclaire l’époque. »

Ce sont des figures très différentes les unes des autres, non ? 

« Pas pour moi. Prévert est un enfant. Il a la méchanceté de l’enfant. Cobain avait la lucidité et la candeur d’un enfant. Chaque être humain a été un enfant. Il y a une phrase dans le journal intime de Marilyn Monroe qui est très proche de ce qu’a pu exprimer Cobain : « Puisque vous pensez que je suis folle, je vais me comporter comme une folle. » Le statut d’icône est enfermant. Il y a en commun chez eux l’arrogance, l’insoumission. Je me souviens d’une interview de Lou Reed par Antoine de Caunes où Lou disait vouloir écrire comme Shakespeare. Il avait pour ambition de donner au rock’n’roll son âge adulte. C’est un peu comme un serment que l’on se fait. J’ai réellement compris Lou Reed à ce moment-là. Il était différent lorsqu’il était enfant mais ensuite il y a eu les électrochocs en hôpital psychiatrique qui ont totalement changé sa vie. »

Comment as-tu choisi les artistes qui interviennent dans le disque ? 

« J’ai choisi les personnes qui m’intéressaient. J’avais aimé leurs travaux. Il y en avait que je connaissais comme Ronan Chéneau, d’autres non comme Capucine et Simon Johannin que je n’ai connu qu’en leur parlant du projet. Christophe Fiat est quelqu’un que j’admire beaucoup et qui plus est un grand fan de Lou Reed. Quant à Blandine Rinkel, c’est quelqu’un de passionnant… Je leur ai demandé de se questionner sur la transgression chez Lou Reed : dans son œuvre comme dans son attitude. Je trouvais intéressant d’avoir des points de vue différents. »

 

 

Comment as-tu pensé le spectacle ? 

« Pour moi il était évident qu’il ne devait y avoir ni guitare, ni perfecto. J’ai pensé à faire les morceaux de Lou Reed en français avec des synthés. L’idée était de replacer Lou Reed dans un autre environnement. »

C’était inimaginable de reprendre ses morceaux en anglais ?

« Tout à fait. Cela aurait été ringard. Cela n’aurait eu aucun intérêt. Cela n’a pas été facile de retranscrire ces titres en français. Ce fut même un véritable défi. »

Comment as-tu eu l’idée de travailler avec Simon Henner aka French 79 sur ce projet ? 

« Le fait d’avoir bossé avec lui n’est pas un hasard. Je le connais depuis très longtemps. Il avait réalisé mon album précédent. Des choses me sont apparues en travaillant avec lui. Nos deux univers s’imbriquent. Sa musique est comme un tapis rouge pour ma voix. Lorsque j’ai eu cette proposition pour ce spectacle autour de Lou Reed je le lui ai proposé et il a été tout de suite partant. Il a apporté de la simplicité dans ma poésie. On a vraiment trouvé quelque chose d’intéressant ensemble. Quelque chose est né de notre rencontre. »

À la base ce ne devait être qu’un spectacle et puis c’est devenu ce disque qui sort aujourd’hui… 

« On a eu l’idée de le sortir en disque car nous étions enfermés avec le confinement. On devait donner des concerts avec un grand écran sur lequel seraient projetées des images et des interviews de Lou Reed. Une tournée de trente dates était prévue. »

Ce disque est autre chose qu’un hommage à Lou Reed. 

« Totalement. Je ne voulais surtout pas faire un hommage. J’avais envie d’aller titiller Lou Reed. Il y a des vocoders sur le disque ce qui pour des rockers est un crime de lèse-majesté. Être artiste c’est faire entendre une parole que les gens n’arrivent pas à formuler. Cela a été mon ambition avec ce disque. Des gens m’écrivent pour me dire qu’ils ont redécouvert Lou Reed grâce à cet album. Rien ne pouvait me faire plus plaisir. »

 

The unreal story of Lou Reed

 

La forme est très littéraire. 

« Je suis profondément littéraire. Tous mes disques, tous mes textes le sont. Je me suis inscrit dans ce chemin. J’écris de la poésie. Face à la bêtise ambiante je relis Foucault, Deleuze, Chomsky. J’aime particulièrement Foucault, des œuvres comme Surveiller et punir ou Histoire de la sexualité sont des œuvres majeures. Et c’est tellement beau. »

On pourra enfin voir ce spectacle à l’avenir ? 

« On l’espère. On croise les doigts. On a déjà reporté trois fois la tournée. Elle aura lieue si les programmateurs le souhaitent. »

 

PIERRE-ARNAUD JONARD

>> Le site de Fred Nevché

Fred Nevché et French 79-The Unreal Story of Lou Reed

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