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LA MAISON TELLIER

Maison Tellier

Mon prochain concert, ce sera dans ma rue

LES CONFINÉS DE LA MUSIQUE. ÉPISODE 29

Pendant cette période pour le moins troublée et troublante, Longueur d’Ondes fait le tour des artistes mais aussi professionnels des musiques amplifiées de l’espace francophone (cœur du magazine) afin de parler de la situation et de ses conséquences… Aujourd’hui : Yannick Marais, alias Helmut Tellier, auteur-chanteur de La Maison Tellier.

Avec déjà plus de 15 ans d’existence et six albums à son actif, ce groupe Rouannais composé de cinq musiciens a roulé sa bosse sans jamais perdre l’envie de créer et de garder intact le plaisir de jouer. Leur nom, surgit d’une idée de Yannick, est emprunt à la nouvelle de Guy de Maupassant dans laquelle une maison close normande est tenue par une Madame Tellier. Tous adoptent alors ce patronyme, se proclamant ainsi frères de scène. En tant que chanteur, Yannick reste le pilier principal du groupe, il est aussi auteur compositeur (tout comme Sébastien Miel, alias Raoul Tellier, multi-instrumentiste, principalement guitare, qui a co-fondé La Maison Tellier avec lui). Cependant il aime à rappeler le lien essentiel qui existe entre tous les membres du groupe : « Chacun en forge le succès et appartient à la tribu, à la Horde… » (Entrevue – Longueur d’ondes N°89).

Si la tendance des tous premiers albums était plutôt country/folk évoquant les plaines lointaines américaines, un virage a été amorcé ensuite, plus pop-rock avec des belles ballades mélancoliques, du blues, et de plus en plus de textes en français, raffinés et poétiques, sur de belles mélodies entêtantes. Après s’être tourné vers le passé avec Beauté pour tous, puis dans l’introspection avec Avalanches, l’album Primitifs modernes va résolument de l’avant, à la fois plus sauvage (retour aux guitares et aux amplis) et plus moderne (utilisation de synthés). L’album est parfait pour le live et sonne comme un retour à l’essentiel. Le groupe a acquis maturité et sérénité, tout en ayant su garder générosité et simplicité.

 

 

Comment vis-tu cette période ?

Plutôt bien. Je suis étrangement serein.

Tu es où là ? Tout seul ?

Je suis en famille, dans mon domicile normand avec deux enfants, deux chats et un petit jardin pentu.

Ce qu’on vit là, ce virus qui se propage à la vitesse de la lumière et qui met le monde KO, c’était quelque chose de prévisible pour toi ?

Pour moi spécifiquement, non. En revanche, les scientifiques semblent avoir alerté les autorités depuis pas mal de temps sur l’irruption d’une pandémie. Si les scientifiques le disent, c’est que c’est vrai. Ce sont ces mêmes scientifiques qui nous alarment sur le cataclysme écologique en cours, et que personne n’écoute non plus.

Pendant cette période, tu as continué à jouer et à composer, est-ce que ta musique a été changée/influencée par ce qui se passe dehors ?

Disons que tout prend plus d’épaisseur, tout se retrouve jaugé à travers le filtre grossissant de ce sentiment diffus de douce apocalypse. Ce n’est pas facile de trouver des mots qui pourraient s’échapper et nous emmener avec eux, loin de tout ça. J’ai déjà beaucoup parlé d’hier dans mes chansons, j’essaie de trouver comment parler d’aujourd’hui ou de demain de manière pertinente.

Est-ce que vous répétez à distance ?

Nous enregistrons à distance, et travaillons sur de nouveaux morceaux, tous les 5.
L’absence et la distance créent le manque. Ils me manquent.

 

 

Tu angoisses de ne plus faire de live ?

Je refuse l’angoisse. Pour quoi que ce soit.

Est-ce que des concerts ont été annulés ? Comment as-tu rebondi ?

Nous avons effectivement des concerts annulés et reportés, oui. Mon besoin de musique, je l’assouvis au quotidien, je découvre, je joue, j’écris. Mon prochain concert, ce sera dans ma rue, lorsqu’on pourra de nouveau vivre “normalement”, avec les gosses et les potes musiciens du quartier. Peut-être va-t-on revenir à la tradition des troubadours, allant de ville en ville, proposant leurs chansons contre gîte et couvert.

Ça te fait réfléchir différemment ? Est-ce que tu vois les choses sous un autre angle désormais ?

Je vois les choses plus sereinement peut-être. Cette petite voix qui disait sans cesse « Mais tu pourrais être en train de faire ceci, cela, fais quelque chose d’utile » a été obligée de la mettre en veilleuse.

T’as pas eu envie de tout lâcher ?

Jamais de la vie.

Tu crois que tout cela aura un impact durable par la suite, est-ce que la prise de conscience sera suivie d’actes pour minimiser les risques futurs voire les anticiper ?

Je sais que pour comprendre, l’homme a besoin qu’on lui mette le nez dans le purin. Les plus éveillés saisiront que la peur qui s’est emparée d’eux au début de la pandémie n’est RIEN en regard de celle que la vraie colère de la Nature a en réserve dans les années qui viennent. Ceux qui refusent de voir cette réalité ne m’intéressent pas.

L’industrie de la musique est paralysée, quels qu’en soit ses composants et quelle que soit la taille des acteurs qui la composent…

Je souhaite que les salles, les tourneurs, les techniciens, les artistes sortent le moins meurtris possible de tout ça. Je le souhaite. Je ne le pense pas. Comme beaucoup en ce moment : je prends un jour après l’autre.

Si tu pouvais faire un vœu pour demain ?

Avoir 1000 vœux.

Ta playlist confinement : 5 titres.

“There’s no Way out of Here”, David Gilmour.

“Good Luck”, Broken Bells.

“Long Way Home”, Tom Waits.

“Enjoy the Ride”, Morcheeba.

“Quand les Jours se Suivent”, Manset.

 

Propos recueillis par Valérie Billard

 

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