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ODEZENNE

Toujours plus loin, toujours plus haut !

Un album mature, du son qui tape et des textes épurés… Odezenne quitte pour de bon le monde du rap, pour entrer dans la sphère de la chanson. Fini les samples et les flots de paroles à outrance. Alix, Jaco et Mattia pèsent chacun de leur mot, de leur son et ne laissent aucune place à l’aléatoire.

Totalement libres, ces alternatifs gravitent dans le milieu de l’indépendance depuis des années. Pour concevoir leur nouvel opus, ils ont choisi de s’expatrier sept mois à Berlin car c’est la capitale la moins chère d’Europe. La ville leur a offert un havre de paix, propice à la débordante créativité qui les caractérise. « On avait besoin de couper avec le travail parce que l’indépendance, c’est quand même très aliénant. La solution était de perdre tous nos repères, pour retrouver le rythme de l’écriture. C’est bizarre parce que, quand on nous demande si Berlin nous a influencés, on répond tout de suite non, car l’on n’a pas spécialement rencontré de gens, à part les barmen entre le studio et la maison. Et au final, un an et demi après, lorsqu’on écoute les sons enregistrés là-bas, ils sont vraiment différents de ceux que l’on fait ici. Le vieux rock, le son des années 80, ça a dû nous influencer ! »

Odezenne - Longueur d'Ondes N°76 - ©Mathieu Nieto

En prenant ce virage à 180 degrés, le groupe bordelais a bien l’intention de taper haut et fort. Depuis des années, Odezenne attendaient ce moment de maturité artistique. « Sur Ovni et Sans chantilly, on écrivait chacun nos textes de notre côté. Sur Rien, on a commencé à se relire l’un et l’autre. Et sur celui-là, on les a écrits à deux. La différence aussi, c’est que l’on a tout rédigé sur les musiques. On est toujours avec Mattia quand il crée. Donc on est à l’écoute. On pond quatre lignes. On va l’enregistrer sur le téléphone. On l’essaie, comme un groupe qui répète. Il y a moins de mots aussi. Dans le rap, il y a un côté un peu “éjaculateur précoce”. Tu veux tout dire et au final… »

« Sans chantilly, cela voulait dire sans fioritures, sans superflu ; et en fait, c’est ce que l’on fait maintenant. Depuis le début, on aspire à cette étape, ce qui prend du temps. » Leur plume paraît très premier degré ; pourtant, les différents niveaux de lecture sont sans équivoque. « On s’est trop régalé là-dessus. On a mis en place des procédés de versification bien spécifiques. C’est bourré de contraintes, et même si cela semble être écrit par un enfant de 4 ans, c’est ultra pensé. » Au niveau du son, Odezenne a investi dans des machines analogiques telles que des synthés ou des boîtes à rythmes mythiques. Le groupe a également fait un gros travail sur les voix. Alix, l’un des deux paroliers, est beaucoup plus mélodique que sur les albums précédents. « On avait cette idée de faire de la musique et des chansons un peu moins couche sur couche. »

Inventif et jusqu’au-boutiste, Odezenne a révolutionné le monde de la musique en s’imposant sur la toile, jusqu’à enfin attisé la curiosité des majors. À presque 35 ans, leurs choix sont assumés et personne ne peut imaginer les faire changer de route. Les nombreuses expérimentations d’Odezenne ont donné au groupe une assise irréfutable. Pendant une petite dizaine d’années, Alix, Jaco et Mattia ont ainsi navigué à vue dans le milieu de l’indépendance. « En 2007, on a fait tourner quelques démos et ça ne prenait pas. Du coup, on a dû s’organiser tout seul. Tu crées une asso pour sortir ton premier album, et tu ne te rends pas tellement compte que tu es en train de créer un label et produire un disque. C’est par la force des choses que l’on s’est organisé de telle manière, mais on a pris plaisir à le faire. Le problème est que cela prenait pas mal de temps ! On a fini par franchir le pas puis signer une licence d’exploitation sur cet album dans la maison de disques indépendante Tôt ou Tard. C’est borné dans le temps, très cadré et surtout ça garantit une totale indépendance de production. Aujourd’hui, Odezenne est signé officiellement sur Universeul, notre label, ce qui n’était pas le cas avant; on peut donc se concentrer sur tout le contenu artistique et l’esthétique du groupe qui nous a toujours fait kiffer. »

 

 

Interdisciplinaire, Odezenne s’attaque à toutes les formes d’expression. D’ailleurs, leur nouveau « dada » est de mettre sur pied un atelier itinérant qui mélangerait l’image, le son et l’écriture. Ces contenus alimenteront un site internet un peu expérimental. « L’idée consiste à faire une sorte de cahier de brouillon, mais public, avec des chansons, des billets d’humeur, de la vidéo, du texte, des bouts de musique, des petites expériences qui refléteront notre humeur, notre état d’esprit à un moment donné… »

EXTRA Documentaire :

Le documentariste Noël Magis a suivi Odezenne durant plusieurs mois. Sa discrète caméra a su se faire oublier et permet au spectateur d’être le témoin de moments intimes extrêmement forts. « Il a été question de le sortir en même temps que l’album, parce qu’il se trouve que le film s’appelle Subland. C’est le nom de l’endroit où l’on avait notre studio à Berlin. Et notre album s’appelle Dolziger str.2, qui est l’adresse où l’on habitait. Nous faisions ce trajet-là tous les jours. Mais nous avons préféré attendre pour ne pas bafouer une partie de l’imaginaire de nos fans, avec des images. »

 

Le site d’Odezenne

Dolziger str.2 / Tôt ou Tard

Texte : JOHANNA TURPEAU

Photos : Fanny Genty

 

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