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FISHBACH

3 Novembre 2022, Rock School Barbey, Bordeaux

 

On vous parlait de Fishbach dans le magazine n°96 qui portait son portrait en Une. Ce jeudi 3 novembre au soir, Flora de son prénom, était en concert à la rock school Barbey. Sans sectarisme de ma part (ce n’est pas le style que je suis forcément habitué à écouter), les quelques recherches live que j’avais faites jusque-là sur l’artiste et ses chansons ne m’avaient pas vraiment préparé à la soirée que j’allais passer, dans un tourbillon de fumerolles psychédéliques. Revenons en arrière afin que je vous relate son déroulement…

 

C’est Walter Astral qui débute les réjouissances. Les deux musiciens entrent en scène sur un fond rythmique semi techno auquel vient s’ajouter des effets électroniques variés et des sonorités indiennes pincées corde après corde sur un banjo. Quand la guitare se branche, le massif pédalier d’effets sert à mixer divers riffs sur des spectres différents.  Les voix qui s’y greffent sont aériennes, comme gravées dans l’éther. Les interventions vocales entre les morceaux sont théâtrales et amusantes. Leurs chansons parlent de nature, de mysticisme, de commencement. Si l’on ferme les yeux, on s’imagine un arbre poussant inexorablement, faisant boucler ses branches à la manière des bras des danseuses hindoues.

Le duo d’apprentis druides venus du Berry joue sur des rôles asexués échappant aux catégorisations de notre monde. Les strates s’ouvrent et, tandis que l’un pince son banjo tel une cithare, l’autre s’active au-dessus de ses claviers d’effets comme en transe au-dessus d’un chaudron. La potion qui en sort est électrisante et bienfaisante. Pendant l’inter-concert, appuyé le dos à la scène, je regarde le public. J’aime voir les gens autour, leurs styles, leurs vêtements et m’imaginer les sujets de discussion auxquels ils s’adonnent pour tuer l’attente. Certains sont concentrés sur leurs conversations, d’autres chantonnent en se dandinant sur “Week-end à Rome” de Daho.

 

Fishbach et son univers

La lumière s’éteint et les musiciens prennent position. D’abord, le batteur écrasant la pédale contre sa grosse caisse translucide à un rythme soutenu.  Un choix que je ne vais pas personnellement critiquer, étant moi-même batteur. Fishbach avance dans les vapeurs de fumée pour s’installer devant le micro perché au milieu de la scène. Chapeau sur la tête, cigarette à la main, vêtue élégamment d’un ensemble veste-pantalon-gilet aux inspirations espagnoles, la toréador brille d’un noir intense. Sa voix finement ciselée (pour éviter la gravité du terme éraillée),  a une fluidité cristalline aussi perçante qu’un diamant.

Ses influences, puisant dans les années 80 avec ce soupçon de rythme clairement actuel, habillent son jeu et ses textes d’une personnalité très marquée. Enchaînant les morceaux comme bon lui semble, elle joue de cette particularité pour tester en live des ordres nouveaux. Le clavier ou la basse enrobent parfois la mélodie d’une aura très “animé japonais”, tel que l’on en croisait au club Dorothée. Un petit air de Nicky Larson flotte même à un moment…

Jouant avec sa voix pour verbaliser ses idées dans toutes les échelles d’émotions possibles, ses chansons sont l’essor de volutes traversant son esprit. Sa touche très personnelle séduit et anime la foule qui danse littéralement sur ses morceaux. On ne peut s’empêcher d’évoquer des influences comme Véronique Sanson, Jeanne Mas et Catherine Ringer bien sûr, mais Flora a cette présence, ce timbre vocal et cette personnalité qui la mettent à part, dans un monde qu’elle a elle-même construit.

“Mortel” assoit une ambiance de fou dans cette salle dansante. Attisée par la foule, elle reviendra pour un rappel vibrant où toute la salle se mettra à danser sur le rythme appuyé des basses. Que l’on soit fan ou moins candidat à ce style de répertoires, on ne pourra s’empêcher de retenir de ce concert et de cette artiste un univers emprunt d’une personnalité musicale qu’elle porte avec talent.

Jason PINAUD

Photos : Jessica CALVO

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