DJ et producteur de talent, Vikken est devenu depuis peu auteur. Son premier EP Joie avait été une réussite. Depuis il enchaine les live et se projette déjà dans un futur album que l’on a déjà hâte d’entendre.
Crédits photo : Pierre-Arnaud Jonard
Avant de passer à la composition Vikken a d’abord été DJ et producteur. Le passage du DJing à l’écriture s’est passée de façon naturelle, d’abord plutôt comme un hobby avant qu’il n’enclenche la vitesse supérieure début 2020 : « A ce moment-là j’avais des morceaux. J’ai mis ma voix dessus. »
Même si Vikken est devenu compositeur, on retrouve assez naturellement dans son EP la vibe de la nuit propre aux DJs : « La nuit reste un gros pan de ma vie. J’en ai besoin. C’est un espace de liberté hyper important. Il y a une introspection dans ce disque que l’on peut retrouver dans la nuit. »
Amoureux de l’électro ambient, on retrouve cette sensibilité musicale dans son disque : « Ces morceaux correspondent à une période de ma vie. Le côté ambient est propre à ce que je vivais à ce moment-là. Il y aura sans doute toujours ce côté ambient dans ce que je ferai à l’avenir même si je sais que j’irai aussi dans des territoires musicaux différents. Je suis un grand fan d’Aphex Twin, des productions Warp. Pour moi ce que je produis est de l’ambient-pop, le côté pop venant du chant en français. »
Cet EP ultra personnel a été pour l’artiste une manière de se libérer. Il y aborde les thèmes de l’identité, du questionnement des normes : « Ce que l’on entend dans “Pour une amie” ce sont des choses que l’on m’a dites, que j’ai pu entendre et qui sont d’une extrême violence. J’étais dans une logique cathartique en faisant cet EP. Cela m’a bouleversé que des gens puissent être touchés par ces questions d’identité même si à la base je n’ai écrit ce projet qu’en ne pensant à ma propre expérience. »
Une question de norme que l’artiste interroge dans le clip de “Pour une amie” où l’on voit des corps ignorés d’ordinaire : « On y voit des personnes grosses, des amies comme Jeanne Added qui interroge les normes ou November Ultra qui est une artiste qui ne ressemble pas aux stars que l’on voit à la télé ou bien encore un ami trans. J’aime l’idée de diversité, de montrer des gens que l’on ne montre pas, en général, dans les magazines. Nous sommes prisonniers de schémas normatifs et au final complètement Matrixés. »
Longtemps militant, Vikken passe aujourd’hui à une autre étape de sa vie : « Si j’ai été militant à un moment donné, je ne le suis plus aujourd’hui. J’ai voulu m’en détacher pour me consacrer à la musique. J’ai envie que l’on me voie comme un artiste avant que l’on me voie comme un militant. Mon envie première est de créer, avant même que de faire changer les mentalités. Je n’ai même pas pensé “Pour une amie” comme un texte militant même si de nombreuses personnes l’ont perçu ainsi. J’y suis juste moi. »
De descendance arménienne, Vikken n’a pas trouvé dans ses racines l’ouverture d’esprit que l’on peut trouver dans le monde de la nuit : « Nous sommes une énorme diaspora mais cela ne veut pas dire que nous sommes ouverts. Au contraire j’ai trouvé cette culture enfermante. Il y a de plus le poids de la religion qui est utilisée pour appuyer la domination. »
Avec Joie Vikken a conçu une œuvre faite à la fois pour danser et pour penser. Ses textes toucheront en plein cœur tous ceux qui s’interrogent sur la question du genre mais et c’est là toute la beauté du projet. On peut aussi tout simplement danser sur ces titres et se laisser porter.
PIERRE-ARNAUD JONARD
Ecouter l’album Joie (Autoproduction – distribution idol/Tomboylab)
.
