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Chroniques BD

 

Hellfest Metal VortexHELLFEST – METAL VORTEX

Jorge Bernstein, Fabrice Hodecent & Pixel Vengeur

(Rouquemoute – collection Hellmoute) 20 €

À la suite d’une messe satanique ratée au milieu du festival metal/rock de Clisson (laissé en accès libre à l’année), la statue de Lemmy Kilmister qui y trône (ou du moins sa précédente version – celle-ci ayant été changée depuis pour des questions de sécurité) reprend vie. Et le site, lui, est même reconverti en golf géant ! Pour y remédier ? Trois potes partent ainsi à la recherche de l’esprit du Hellfest et rectifier ce qu’ils ont provoqué… Tel est donc le pitch de cette bande dessinée potache, réalisée via un crowdfunding et créée en collaboration avec l’événement. On y regrettera parfois, malgré les multiples références discrètes, quelques blagues éculées pour rendre le propos sans doute plus accessible aux plus jeunes et/ou néophytes. On y appréciera surtout les unités de couleur d’un objet intelligemment enrichi dans sa version luxe et qui, plus qu’un clin d’œil nostalgique à un genre, reste avant tout une déclaration d’amour à un festival et son territoire.

 

 

UNDERGROUND Rockeurs maudits & grandes prêtresses du sonUNDERGROUND – Rockeurs maudits & grandes prêtresses du son

Arnaud Le Goëfflec & Nicolas Moog

(Glénat) 30 €

C’est un pavé. Autant par son poids que son contenu. Mais surtout une bible essentielle qui, si la forme « bande dessinée encyclopédique » n’est certes pas neuve, a le bon ton de se vouloir érudite sur le fond sans être académique sur sa forme – pouvant ainsi convaincre/attirer les plus réticents à ces intimidantes 312 pages cartonnées. Car plutôt que dresser l’habituelle généalogie rock éculée, l’ouvrage a décidé de se concentrer sur la musique indépendante, celles des marges, ces inconnus ou non reconnus ayant pourtant participé (voire parfois bouleversé) le cours de l’histoire des décibels. Daniel Johnston, Yma Sumac, Moondog, Peter Ivers, Merrell Fankhauser et autres rockeurs maudits… Ce sont 50 récits biographiques (et heureusement aérés) d’auteurs sous-écoutés et préfacés par le professeur Michka Assayas qui sont ainsi réhabilités et soulignés par un trait noir épais pour, espérons-le (c’est le but) ne plus quitter ce retour à la lumière.

 

 

KILL ANNIE WONGKILL ANNIE WONG

Swann Meralli, Gaël Henry & Paul Bona

(Sarbacane)

C’est le premier roman graphique du scénariste lyonnais, épaulé par un illustrateur qui sait faire évoluer son style selon les trames confiés (ici des contours plus punks et des couleurs – dans une palette jaune – plus crues pour mieux encadrer la mégalopole coréenne décrite). Et de musique, il en est justement question en fil rouge… Une musique invisible, et pourtant omniprésente. Obsessionnelle. Le sidekick inséparable d’un jeune tueur à gages muet qui se repasse inlassablement le morceau d’une mystérieuse chanteuse quand il tue des anonymes pour le compte de clients. Jusqu’à ce que sa dernière mission – dont le dilemme inspire le nom de la bande dessinée – se révèle être la dite-cantatrice… Mais au-delà de la quête existentielle classique à ce type d’histoire, l’ouvrage se révèle surtout passionnant sur son interrogation inconsciente sur la musique, vecteur d’émotions éminemment personnelles, de fantasmes ou réflexes pavloviens. Et éternelle bande originale de nos vies.

 

 

A la recherche de GIL SCOTT HERON "Le parrain du rap"À la recherche de GIL SCOTT-HERON – Le « parrain du rap »

Thomas Mauceri & Seb Piquet

(Les Arènes) 24,50 €

Il fallait bien un réalisateur pour raconter une absence. Un fantôme. Aux résonnances personnelles – surtout – et mondiales. Car Gil Scott-Heron, pilier de la cause afro-américaine et légende de la musique noire a beaucoup écrit (romans, polars, poèmes…) avant d’être l’un des pionniers du spoken word, à l’origine du hip-hop. Mélangeant jazz, soul, funk, émeutes raciales et violences policières. Revendiqué par Kendrick Lamar, Eminem, Snoop Dog, le Wu-Tang, Kanye West ou encore Jay-Z, lui qui refusait pourtant cette étiquette de parrain sous prétexte que ses filleuls « font n’importe quoi ». Et c’est bien de cette sagesse et de ces influences dont l’auteur voulait faire un documentaire. Hélas, après de nombreux rendez-vous manqués, l’artiste meure le jour de la rencontre programmée… Thomas Mauceri n’aura ainsi jamais l’occasion de lui dire à quel point ses mots furent aussi un réconfort au racisme qu’il a lui-même vécu et raconté ici via un trait quasi crayonné. Ou l’esquisse d’une vie.

 

Samuel DEGASNE

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