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David Marin

David Marin

Avec le vent et la marée

Si l’attente était longue avant de voir sortir le deuxième album du Québécois David Marin, elle en aura valu la peine. Il y a des parcours de vie musicale qui nécessitent de prendre leur temps, et « Le choix de l’embarras » ne déroge pas à cette règle. Retour sur un chemin tranquille, sous un temps clément où les étoiles se sont alignées pour faire de cet opus une bouffée salée rafraichissante entre beaux mots et mélodies instinctives.

« Cela ne m’a pas paru long, ce temps entre les deux albums » lance toute de suite David Marin. Six ans après « À côté d’la track », réalisé par Louis-Jean Cormier, David rempile avec son même comparse derrière les manettes et les instruments, auquel s’ajoute Pierre Fortin : « Un trio d’auteurs-compositeurs-interprètes, c’est une belle force pour réussir un album !». Alors que s’est-il passé depuis ? « On vit, tout simplement ! Il y a eu la tournée pour le premier album, le temps que tout cela s’installe, finalement l’aventure « À côté d’la track » aura durée trois ans. Puis après, le projet des « 12 hommes rapaillés » s’est offert à moi [NDLR : En hommage au poète québécois Gaston Miron, plusieurs artistes ont mis en chansons ses poèmes et proposé un spectacle ainsi qu’un album]. C’est le genre d’opportunité que l’on ne peut pas refuser. En plus, pour sortir un album, il faut avoir quelque chose à dire. Cela parait simpliste de dire cela, mais il faut avoir du vécu, de l’expérience et le goût d’avoir quelque chose à partager. »

Random RecipeUne autre composante est que cet album a été entièrement produit par David Marin lui-même : « Cela a les avantages de ces inconvénients ! D’un côté, tu es seul maître à bord, tu tiens les rennes de ton projet par tous les bouts, que ce soit le financement, la structure de production, l’écriture, l’inspiration créatrice. Mais de l’autre, il n’y a personne à côté de toi pour te bousculer, t’encourager et te pousser, et tu n’as aucune deadline. C’est un risque financier également, quand comme moi tu as une famille, tu y réfléchis à deux fois. Il faut être réaliste, de nos jours, on ne devient pas riche en faisant un album. L’aspect pécuniaire n’est pas le moteur même si on souhaite tous en vivre mieux. On le fait par passion et parce que l’on veut transmettre quelque chose. Et honnêtement, tu es mieux d’avoir d’autres projets à côté et de ne pas mettre tous tes œufs dans le même panier, même si, pour cet album, j’ai tout donné et que j’en suis vraiment fier car il représente ce que je suis. »

DAVID MARIN: Le vent vire from DTO FILMS on Vimeo.

Si l’album a mis du temps à se profiler, il faut croire que l’air du large de la Gaspésie aura été le coup de pied à l’étrier dont David avait besoin : « Je finissais le dernier spectacle des Hommes rapaillés, dans un contexte extraordinaire, puisque l’on jouait au Festival en chanson de Petite Vallée, dans un paysage idyllique. Le lendemain, je m’installais pendant une semaine, tout seul, dans la petite église de Gaspé, qui est également une salle de concert. Six jours, six chansons, voilà ce que cela donne. Je me suis mis la pression tout seul, pour enregistrer. Il faut dire que quand tu laisses femme et enfants pendant une semaine, tu es mieux de ramener des chansons en rentrant ! » plaisante-t-il. À partir de là tout s’enchaine facilement : il fait écouter les titres à Louis-Jean Cormier qui décide d’embarquer dans le projet, l’enregistrement suit ainsi que l’étiquette de disque : « On dirait que tout s’est parfaitement enligné. Le monde idéal s’est produit. Je voulais poursuivre la collaboration avec Louis-Jean Cormier, parce que l’on avait travaillé ensemble sur le précédant album et sur les hommes rapaillés. Cela aurait pu être impossible pour lui d’être disponible au moment où je faisais ce disque, mais cela a fonctionné. Je voulais jouer plus, je voulais que l’on prenne plus le temps aussi, donc on a fait cela dans le studio de Louis-Jean, ce qui nous a permis de quasiment doubler le temps de présence au studio. Ce que l’on a fait là représente exactement ce que j’avais envie de faire. Jusqu’à la pochette, tout me ressemble. Après cela, si j’ai une place ou pas dans le paysage de la chanson québécoise, ce n’est plus de mon ressort, mon bout est fait ! »

La sensibilité des paroles est l’une des grandes forces de cet album, pour celui dont la voix fait penser à Jean-Louis Aubert : « Le plus important pour moi, c’est l’écriture. Je sais que je suis gâté avec les musiciens avec lesquels je collabore. J’arrive toujours avec une trame musicale assez simple, sur laquelle travaillent les musiciens, alors que pour l’écriture, j’ai du mal à faire cela en équipe. Gaston Miron par exemple m’a bouleversé. Jouer avec les mots cela peut être anecdotique : j’ai voulu peaufiner cela. Je suis également un fan de Bashung. Le fait d’interpréter des textes plus sensibles, de voir que j’étais capable de le faire et de prendre plaisir, je trouvais que cela manquait à mon répertoire. J’ai commencé à introduire des choses plus sombres, qui cherchent plus à livrer directement de l’émotion. Que l’on sente que je suis quelqu’un d’engagé et que cet engagement passe d’abord par réussir sa vie personnelle sentimentale, familiale. Si tu réussis cela, que tu es honnête là-dedans, alors tu pourras aller te battre pour ce que tu voudras : le français, l’environnement, les étudiants… mais d’abord ne détruit pas ce que tu as chez toi. »

David Marin « Le choix de l’embarras »,
Simone Records sorti le 15 octobre 2013

Yolaine Maudet
Photos Michel Pinault

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