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VS

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Nous vous avions déjà parlé de VS en 2012 lors de la sortie de ce qui était finalement la maquette de « CiTies R reaL », le premier album du groupe, sorti à la fin de l’année qui vient de s’écouler. Aujourd’hui armé d’un album retravaillé, orné d’une nouvelle pochette et augmenté de trois nouveaux titres, le groupe nous offre avec ce disque la bande-son du film imaginaire qu’ils esquissent déjà aux cours de véritables ciné-concerts depuis plusieurs années…

Votre musique est un vrai patchwork de genres et d’instruments, mêlant à la fois le rock et notamment son versant psychédélique et planant, des éléments orchestraux, des textures électroniques, etc. Pourtant, vous parvenez à un ensemble très homogène. Y a-t-il un gros travail de votre part sur la vue d’ensemble ?

DriX : Nous sommes très pointilleux sur la composition ainsi que sur les arrangements, mais nous laissons toujours Guillaume (batteur) et Frédéric (bassiste) apporter leur touche personnelle, leurs conseils et leur recul sur le morceau. Nous composons, mixons, enregistrons, produisons tout nous-mêmes dans notre studio personnel. Certains titres de l’album, notamment sur les prises de sons, ont été travaillés main dans la main avec notre ingé son (Gregory Esmieu).
Svein : Le mélange de l’électronique et des instruments acoustiques, c’est un peu l’idée de l’hybride homme-machine. Nous voulions aussi que chaque morceau ait son identité, son esthétique.

De premier abord, votre musique paraît douce et planante, mais la construction des morceaux est parfois surprenante, comme si vous vouliez casser cette apparence de douceur en amenant des montées, des emballements inattendus. Est-ce précisément ce que vous cherchez à créer ?

DriX : Nous ne recherchons pas quelque chose de particulier lorsque nous composons. Les morceaux s’écrivent d’eux-mêmes et nous nous laissons porter. C’est comme si nous n’étions qu’un médium intermédiaire, une machine humaine guidée par quelque chose de plus profond qui nous fait notamment perdre la notion de relativité du temps.
Svein : Le côté inattendu de notre musique vient probablement de nos influences communes, comme le post-rock, la musique classique et les années 70. Parfois les émotions peuvent s’emballer et derrière un calme apparent peut se cacher une certaine violence… tout comme un morceau peut avoir une atmosphère pesante et se terminer par une délivrance.

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On relève aussi des aspects tribaux, par exemple dans les rythmiques, et on oscille entre un sentiment d’apaisement et un mouvement hypnotique qui est bien plus ouvert au danger, en suspens… Penchez-vous plutôt du côté du premier ou du second ?

DriX : Nous aimons l’idée que la musique conduit à la transe et à l’élévation de la conscience.
Svein : Nous cherchons à pousser le danger et l’hypnotisme au maximum au sein même d’un morceau comme « Industrial » qui est fondé sur le thème assez grave de l’industrialisation de masse qui sape sociologiquement et environnementalement notre monde. On peut aussi avoir l’inverse sur d’autres titres comme « Clockwork » qui est plutôt apaisant avec une rupture avant la montée finale. D’ailleurs le thème de ce morceau est, comme son nom l’indique, le temps qui passe ou l’accomplissement d’une vie, avec toutes les difficultés que cela peut comporter.

Le premier EP de VS

Votre musique a un côté très cinématographique et avant même de sortir votre premier EP, vous aviez composé la bande son de plusieurs courts métrages. Mais cet aspect n’est pas seulement dû au pouvoir évocateur visuel de votre musique mais aussi au fait que vos disques suivent un fil narratif. Votre premier EP racontait une histoire d’anticipation. Est-ce aussi le cas de l’album ?

DriX : Oui c’est la continuité du fil narratif de notre premier EP « Just a sigh ». Celui-ci était une vision à échelle humaine ; avec « CiTies R reaL », c’est une vision plus macroscopique du monde, de la ville.
Svein : Cependant, chaque titre a son scénario, sa propre lecture.

Le titre de cet album est assez énigmatique : comment faut-il le comprendre ?

DriX : C’est assez rare que l’on nous pose cette question, c’est peut-être même la première fois. C’est vrai que le titre peut sembler un peu énigmatique. C’est plus ou moins une réponse à notre constat de la société actuelle, du monde d’aujourd’hui. La ville représente l’essence même de la modernité du monde dans lequel nous vivons. C’est un lieu ambigu où il y a à la fois beaucoup de liberté et beaucoup d’interdits et de contrôle. Avec le développement de la mondialisation et du réseau informatique mondial, tout tend à se virtualiser et finalement, tout devient fantasmé (tout va vite, très vite, si bien que tout devient assez incontrôlable… le monde est devenu un tel bordel !) Dans le titre « CiTies R reaL », il y a justement le clin d’œil à CTRL (à travers les lettres en capitales) qui fait référence à ce fameux contrôle informatique et qui est contrebalancé par « is real », donnant au titre son double sens, son opposé.
Svein : C’est en fait la constatation d’un monde qui a évolué vers son « autotyrannie » et qui s’est de son plein gré donné ses libertés… mais dont l’issue n’est pas définitivement condamnée.

Cette phrase semble s’opposer à l’artwork qui évoque une cité imaginaire et un univers magique… Que représente cette ville suspendue et la clé qui semble l’actionner ?

Svein : C’est comme une utopie négative qui aurait réussie à naître. Le simple fait qu’il y ait une clé signifie que la situation n’est pas irréversible.

Quel lien faites-vous entre le monde urbain, plutôt froid, dur et sombre et votre univers sonore doux, aérien et ouvert ?


DriX : Nous aimons jouer avec les contraires, nous ne nous appelons pas VS pour rien !
Svein : Les apparences peuvent être trompeuses car si l’ambiance sonore semble apaisante, le texte peut être tout l’inverse. C’est le cas de « Welcome » qui semble enjoué, mais qui traite en réalité des regrets que vous pourriez avoir si un être cher disparaissait avant de lui avoir dit ce que vous aviez sur le cœur.
DriX : La mélancolie de notre musique prend probablement sa source dans le rapport introspectif de l’humain (l’esprit) par rapport à l’urbain qui l’enferme… Si les corps sont enfermés, l’esprit, lui, peut toujours s’échapper.

Au fait : à quoi renvoie votre nom, VS ?

Svein : A l’origine, c’est le titre de notre premier morceau qui a donné son nom au groupe, mais nous laissons l’explication ouverte, chacun peut se faire sa propre idée.
DriX : Même pour nous, le sens de VS a évolué avec le temps, devenant « Visual & Sound » ou « Vision Sonore » et définissant ainsi notre rapport affectif à l’image… Bref, nous laissons aux gens la liberté d’y trouver leur propre définition par rapport au ressenti de notre musique.

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En effet, vous ne vous contentez pas d’évoquer des images par les sons puisque vous utilisez également beaucoup le visuel lors de vos concerts…

DriX : Nous avons toujours eu cette volonté d’immerger le spectateur dans un monde pluri-sensitif afin de le faire voyager. Nous avons très tôt travaillé sur différents courts métrages et collaboré avec des VJs. Aujourd’hui, nous nous sommes un peu plus recentrés sur nous-mêmes puisque nous créons nous-mêmes nos visuels pour le VJing. Cela nous permet d’être encore plus précis dans l’histoire que nous voulons raconter.
Svein : Nous utilisons les moyens technologiques comme le VJing synchronisé (projection de vidéos sur un écran situé derrière le groupe et interagissant en temps réel avec la musique) ainsi que le mapping (projection fragmentée d’une vidéo sur des cadres de peinture disposés derrière le groupe). Sur scène, nous souhaitons que chaque morceau soit vécu comme un court métrage, une scène animée, et amène à penser l’ensemble du concert comme la narration d’un film.

Site officiel
« CiTies R reaL » / autoproduction
Jessica Boucher-Rétif
Photos Philippe Bauduin

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