Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

FABULOUS SHEEP

Fabulous SheepIl y a une réelle puissance d’abrutissement

LES CONFINÉS DE LA MUSIQUE. ÉPISODE 23

Pendant cette période pour le moins troublée et troublante, Longueur d’Ondes fait le tour des artistes et professionnels des musiques amplifiées de l’espace francophone (cœur du magazine) afin de parler de la situation et de ses conséquences… Aujourd’hui : Charles Pernet, bassiste de Fabulous Sheep.

Si la crise du Covid-19 a sans doute politisé un certain nombre de nos concitoyens, les Héraultais de Fabulous Sheep l’étaient déjà depuis bien longtemps. Les valeurs de solidarité ont toujours été revendiqués haut et fort par le groupe (notamment en soutien au peuple grec). Il faut dire que grandir à Béziers, la ville de Robert Ménard rend forcément sensible à la question politique. Après un excellent premier album sorti début 2019, le combo travaille actuellement sur son second opus.

Comment vis-tu cette période ?  

Je commence à trouver le temps long… Mais on fait avec. Cela n’empêche pas de composer et puis je travaille sur un clip animé. Ce qui est positif, c’est d’avoir du temps.
Tu es où là ? Tout seul ?

Je suis avec ma petite amie, dans un F2 de 37m2 exposé plein nord. HELP ! (rires) C’est elle qui a fait le dessin à la place d’une photo…

Ce qu’on vit là, ce virus qui se propage à la vitesse de la lumière et qui met le monde KO, c’était quelque chose de prévisible pour toi ? 

Je pense que personne ne pouvait vraiment prévoir cela. Mais en effet, ce n’est pas surprenant. La folie scientifique, la recherche sur tout et n’importe quoi alors qu’on finira tous entre 4 planches, la pollution, la destruction du vivant, fallait pas s’attendre à un parfait équilibre dans un tel système mortifère. Tu ne me poses pas directement la question, mais oui les riches qui ont le pouvoir dans ce monde, sont avant tout les premiers responsables.

Pendant cette période, tu as continué à jouer et à composer, est-ce que ta musique a été changée/influencée par ce qui se passe dehors ? 

Oui, je compose, comme la plupart d’entre nous dans le groupe. On ne peut pas bosser ensemble mais on s’échange des maquettes. Mais il n’y a pas un morceau “Corona” dans les tuyaux.

Ton rapport avec les autres membres du groupe ? 

On se parle via les réseaux sociaux, le téléphone, on lâche pas trop le contact, on prépare l’avenir.

Tu angoisses de ne plus faire de live ? 

C’est plutôt de l’impatience… On finira par rejouer, c’est juste que c’est long. On a eu la chance de ne pas prévoir de sortie pour 2020, et peu de concerts, afin de préparer notre second album pour 2021. Ce qui est en bonne voie à ce niveau-là.

Ça te fait réfléchir différemment ? Est-ce que tu vois les choses sous un autre angle désormais ? 

Tout ce qui se passe aujourd’hui avec les réactions politiques et économiques qui en découlent, qui elles, étaient prévisibles, me conforte, dans l’idée de ne pas écouter ces vendus, et de construire un monde différent, à son échelle, par l’action, sans oublier de lutter pour ne pas perdre les bonnes choses construites par nos aînés.

T’as pas eu envie de tout lâcher ? 

JAMAIS.

 

 

 

Tu crois que tout cela aura un impact durable par la suite, est-ce que la prise de conscience sera suivie d’actes pour minimiser les risques futurs voire les anticiper, ou on reviendra dans le monde que l’on connait parce que l’argent plus fort que tout ?

Selon moi, s’il n’y a pas une réaction solidaire et massive, rapidement, avec comme bonne opportunité le corps médical dans la rue, nous irons vers un monde encore plus difficile, encore plus surveillé, répressif, qui étranglera encore davantage les plus démunis. Dystopie que l’on trouve dans n’importe quel film de science-fiction tragique. Les décisions politiques d’ores et déjà prises, les manques de moyens criants au sein des hôpitaux, et plus globalement dans nos services publics, en sont les preuves concrètes. Les problèmes étaient déjà là. Il ne faut pas qu’ils s’amplifient.  Quand tu regardes les réseaux sociaux, que tu essayes de surfer dans différents cercles, tu te rends compte, qu’il y a une vraie colère d’un côté, et une réelle puissance d’abrutissement de l’autre. Cette dernière annihile l’idée de se défendre face à un système qui rend bête, servile pour finir en CON-ssomateur, qui finira CON-ssommé.

L’industrie de la musique est paralysée, il va falloir repenser certaines choses ?

Je n’ai pas la réponse… Si la crise économique est aussi profonde, le monde dans sa globalité va être de toute façon transformé. Tout l’enjeu se résume, comme toujours après une crise, par : solidaire pour le partage ? Et là certaines valeurs comme la popularité (par exemple) n’auront peut-être même plus de sens… OU alors au contraire, ce sera être toujours plus compétitif, le matraquage, le putaclick, le plus plus plus… Le capitalisme encore et toujours. Il y avait déjà des problèmes avant le COVID dans la culture, il y en aura encore après. Si je devais “m’approprier” une phrase de la Scred Connexion (NDLR : groupe hip-hop français formé au milieu des années 90) : « Ne cherche pas la tendance, soit dans la bonne direction, la tienne et puis c’est tout. »

Ta playlist confinement : 5 titres.

Take it easy my brother charlie – Jorge Ben Jor

The Magnificient Seven – The Clash

Urgences Musicales – Dooz Kawa

Holiday Time – Hidegard Knef

Ukraine – Alec Siniavine

 

Propos recueillis par Pierre-Arnaud Jonard

 

 

ARTICLES SIMILAIRES