Groupe à suivre…
Rouen est depuis plusieurs années maintenant en pleine effervescence musicale. De ce bouillonnement culturel naît chaque jour un nouveau groupe intéressant. Parmi les derniers venus, Kumusta a fait forte impression avec son premier EP, véritable bombe post-punk.
Si le premier maxi n’a que quelques mois, le groupe a déjà un certain vécu puisqu’il s’est formé il y a maintenant quatre ans. Mais ce n’est qu’à partir de 2018 que les choses sérieuses démarrent. Le combo prend son temps afin de ne pas gaspiller ses cartouches, mais parce qu’il s’avère aussi extrêmement perfectionniste. Dans cette scène rouennaise où tous les groupes sont amis, Kumusta signe sur Kids Are Lo-Fi Records, label de We Hate You Please Die, sur lequel on retrouve également les très bons Seasonal Affective Disorder, auteurs d’une pop élégante.
L’idée du label est de mettre en avant les acteurs de la scène locale : « Raphaël et Joseph de We Hate You [Please Die] sont des amis. On a signé sur leur label parce que plus qu’un label de musique, c’est un collectif. Ils sont venus nous voir en concert et les choses se sont faites naturellement. On a souvent joué ensemble sur Rouen (NDLR notamment dans ce bar mythique qu’est le Trois Pièces qui a vu émerger toute la scène locale) mais également ailleurs en France. »
Comme nombre de groupes rouennais, Kumusta répète souvent au 106, centre névralgique de la scène locale : « C’est fédérateur de se retrouver tous là-bas. On se soutient, tout le monde s’entend bien. À Rouen, MNNQNS, Elephant, Servo sont arrivés en premier et, derrière eux, plein de nouveaux groupes sont apparus. Nous sommes une petite ville mais à proximité de Paris, ça aide. Nous ne sommes cependant pas obsédés par Rouen. Nous observons avec intérêt ce qui se passe partout en France. »
Souvent étiqueté post-punk, le groupe ne réfute pas le qualificatif même s’il n’aime guère les étiquettes : « Nous sommes un groupe rock. Le post-punk est à la mode et on qualifie de ce terme un peu tout et n’importe quoi. On nous compare souvent à Idles et c’est vrai que nous nous sommes pris, comme plein d’autres, ce groupe en pleine gueule, mais ce n’est pas, loin de là, notre seule influence. Nous aimons beaucoup les Canadiens de Metz qui ne sont pas post-punk mais noise. Nous sommes fans de plein de choses, de Women à Iggy en passant par Jamiroquai ou de pas mal de trucs rap. Ce que l’on apprécie chez Idles, ce n’est pas que leur musique mais l’attitude qu’ils ont envers le public, cette façon de ne pas mettre de barrière avec les gens. On a cette même attitude parce qu’avant de donner des concerts, nous allions aux shows. Et surtout, il n’y a aucune raison de se la jouer parce que tu es dans un groupe de rock. »
Le combo balance avec une rage extrême des titres qui n’excèdent jamais les trois minutes, tel un boxeur des uppercuts. L’auditeur en sort sonné mais ravi. Leurs morceaux pleins de frustration sont totalement ancrés dans notre réalité et affrontent les choses avec objectivité. Lorsque Kumusta parle du prolétariat, le morceau s’intitule “Poor”. Pas de faux semblant. « Tout est politique. Il y a un côté revendicatif chez nous, c’est clair. Nous n’imposons aucune idéologie mais sommes clairement un groupe anti-raciste, anti-sexiste et anti-homophobe. » Cette année devrait voir le groupe sortir un second EP : « On a les morceaux. On a envie de faire un truc un peu plus travaillé que le premier. On attend le bon moment pour le sortir. » Une suite qui devrait confirmer que Kumusta sera incontestablement l’un des groupes français à suivre ces prochaines années.
PIERRE-ARNAUD JONARD
KUMUSTA #1-Kids Are Lo-Fi Records
