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Jeanne Added

Jeanne Added - Photo : Marylène EytierLe 15 décembre 2018 à l’EMB, Sannois (95)

Seul en scène le rémois Ian Caulfield a de vrais airs de skateur avec casquette d’hiver à oreillettes protectrices et baskets montantes. Il danse et dynamite tout l’espace scénique avec ou sans sa guitare, mais toujours avec le micro, son pad multicolore et des sons issus de la dream-pop ou des meilleures boîtes à rythme hip hop. Du brouhaha de son titre “Mess in New York” on passe a des tonalités plus douces sur le premier morceau sorti cette année “Winter Leaf ”. Il enchaîne sur un morceau en français saupoudré d’anglais sans accent. Son patronyme interpelle, hommage au personnage de J.D. Salinger dans L’Attrape-Cœur (roman américain publié en 1951) ou vraies origines anglophones ? Ce qui est sûr c’est que les préoccupations évoquées par ses chansons « au fond de ton imagination, toi petit garçon » se réverbèrent en un vaste spectre spatial, sonore et temporel dans lequel résonnent ou se cognent les ondes interpersonnelles. Ça groove lorsqu’il se munit de sa guitare « I believe I can live in the city » et que le rock urbain s’empare de son instrument vocal sur un déhanché phénoménal de cervicales et un « Bon ça va ?… (Oui !) Cool. » lancé au public.

Ian Caulfield - Photo : Marylène Eytier

Il démarre alors un tour de chant slam anglais plus calme et moins physiquement tumultueux au micro sur des sons magnétiques créant un exotisme électronique. La tension ainsi montée redescend comme sur les cimes de pistes neigeuses sur lesquelles on pourrait facilement l’imaginer comme sous ces projecteurs multicolores. Attention objet éclairant non-identifié ! Impressionnant, il sait aussi échanger avec le public en se présentant à la première personne dans la salle de l’Espace Michel Berger archi-complète : « Moi je suis de Reims et Jeanne Added aussi (…) du coup ça me fait plaisir de faire sa première partie ». Nous aussi ça nous fait plaisir de découvrir ce jeune artiste, produit et protégé par Guillaume du groupe The Shoes.  Les sons se redéchaînent en descentes et montées guitare-voix exécutées sans temps mort, en finesse et dextérité de la jeunesse couplée à la passion. Le dernier morceau est déjà là… Mince on n’a pas vu le temps passer avec un tel tempo « Sannois merciiii ! » Ian Caulfield termine sur ses bonnes paroles : « Give me a place in your heart ». Oui on a hâte d’avoir une place au prochain concert, effectivement.

Jeanne Added - Photo : Marylène Eytier

22 h 05. Trois musiciens entrent en scène dans le dos de Jeanne Added  comme pour garder ses arrières en cas de guerre comme sur le titre de son premier album “A war is coming”. D’emblée, avant la première chanson de sa setlist, “Remake”, elle fait éclairer la salle pour contempler le public présent, doux sourire au visage pour une communion claire-obscure. La lumière s’estompe avant son prochain chant physique, Jeanne Added pratique la boxe et ça se voit dans les petits et grands pas de danse effrénés, ça se ressent sur “Radiate” (chanson-titre de son deuxième album) par exemple avant d’attaquer d’autres enchainements voix-mouvements.

Jeanne Added - Photo : Marylène Eytier

Jeanne danse avec la mélodie, sautille même en harmonie et décuple la douce force lyrique multi-talentueuse de sa voix sur “Mutate”. Un temps fort se prépare lorsqu’elle agrippe sa guitare en performeuse de brio et quelque peu slameuse en show, et que l’on perçoit le premier couplet de “Look at them”, sublime et pur délice d’oreille de Be Sensationnal son premier album.
Un rapide changement de tee-shirt, du blanc vers le noir, sur le titre “Lydia” pendant lequel elle se met à terre sur scène. Elle plie mais ne rompt pas. L’anglais dans les textes, même si on ne le comprend pas, produit bien le langage de l’émotion, de la vie, de la rage qui s’apaise et de l’amour. Avant le dernier titre, la lumière illumine de nouveau son public qu’elle invite à faire les chœurs instrumentaux « Ne soyez pas timides, ça fait du bien ». Est venu le moment de présenter ses musiciens, les techniciens et de remercier chaleureusement sous les applaudissements ne voulant pas la laisser partir de scène.

Elle revient, instrument en main : « Je ne sais absolument pas jouer de la basse, mais je connais trois morceaux que je vais vous jouer ». En intime, sans musiciens pour le premier morceau. Silence du public subjugué, qui se met à rire. Elle confie sur le mode de l’annonce que « C’est l’avant dernier concert de l’année, (ndlr. mais pas de la tournée) Emiliano (ndrl. le batteur central) et moi-même on sera au O’Gib à Montreuil mercredi 19 décembre 2018 car il est menacé de fermer. Je serai en solo avec ma basse ».

Jeanne Added - Photo : Marylène Eytier

 

Un instantané de prise de conscience poignante que sans les petites salles la musique perdrait de sa dimension humaine, sa proximité au profit d’un tout impersonnel noyé dans l’anonyme. Soudain un bouquet final de fleurs lumineuses en flash résonne à l’œil. Fin du concert, 23h36.

Texte : Vanessa Maury-Dubois
Photos : Marylène Eytier

 

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