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METRO VERLAINE

Metro Verlaine ©Christophe Crenel

SPLEEN URBAIN

 

La Normandie a de tout temps produit parmi ce qui se fait de mieux en matière de rock made in France. Metro Verlaine poursuit cette tradition. Après deux EP et de longues années de tournée, le groupe sort enfin son premier album, un Cut Up que l’on attendait avec une certaine impatience.

La Normandie c’est déjà un peu l’Angleterre. C’est sans doute la raison pour laquelle la musique de Metro Verlaine penche si fortement vers l’Outre-Manche. Entre eux et le royaume d’Albion, il n’y a que la mer à traverser. Comme le résume parfaitement le groupe : « Nous sommes baignés depuis l’enfance par l’influence anglo-saxonne. Les groupes normands comme les Dogs, les Olivenstein, Little Bob Story n’ont jamais sonné français à l’inverse de formations comme Metal Urbain ou les Stinky Toys. On peut dire qu’Évreux, c’est un peu notre Manchester à nous. D’ailleurs, comme dans les cités anglaises, il n’ y a pas grand chose à faire ici et c’est ainsi qu’est né Metro Verlaine avec l’envie de créer quelque chose, de sortir de l’ennui. » Le combo revendique des influences allant de Cure à Joy Division, mais lorsqu’ils écrivent un titre comme “Manchester”, ils ne pensent pas qu’à la musique produite par cette ville, mais aussi à l’esprit working-class qui l’anime, football en tête, avec Manchester United en étendard. « Nous sommes bien sûr très branchés musique, mais nous adorons le foot et regardons régulièrement la Premier League (NDLR : première division anglaise). »

Cette envie de coller au réel rapproche dans l’esprit Metro Verlaine d’un groupe comme Sleaford Mods, duo britannique à l’esprit prolo qui décrit de manière crue la vie de tous les jours. « Revenir proche des gens, raconter le quotidien est quelque chose que nous trouvons effectivement intéressant. » La flamme du rock n’est pas la seule qui anime le quatuor. Il y a celle de la littérature avec bien sûr la figure du poète Verlaine, celle de William Burroughs et de sa fameuse technique du cut-up (qui donne le titre à l’album) et des héros maudits de la beat-generation : « Nous lisons beaucoup. Nous avons un véritable amour de la littérature et notre démarche est poétique, sans qu’elle soit pédante pour autant. » Un penchant pour l’écriture qui a d’ailleurs poussé Axel, guitariste et parolier du groupe, à sortir un roman : « J’essaie d’être le plus concis possible lorsque j’écris pour Metro Verlaine. Dans mon livre, j’ai voulu trouver une musicalité. Cela vient peut-être du fait d’avoir travaillé sur Ballade Sauvage lorsque nous étions sur la route. »

Métro Verlaine reprend ainsi avec brio la tradition d’un rock érudit dont la figure de proue était et reste aujourd’hui encore Patti Smith. Car si leur musique a été biberonnée par l’Angleterre, on y trouve aussi des marques de la no-wave américaine et de personnages comme Richard Hell auquel ils rendent d’ailleurs hommage à travers un titre. Axel : « J’ai lu son livre L’œil du Lézard qui m’a vraiment marqué. C’est un road-trip fantastique dans l’esprit de la beat-generation. Il y a beaucoup d’allusions à lui dans nos textes, mais pas toujours là où on les attend. »

Grandir à Évreux n’est peut-être pas chose aisée mais la ville a longtemps été connue pour accueillir l’un des meilleurs festivals français : Rock dans tous ses états. Une structure qui a permis au groupe de décoller. « Les gens de l’Abordage (ndlr : salle de la ville) qui organisaient le festival nous ont mis le pied à l’étrier. Dès nos débuts, ils nous ont programmés là-bas. Nous avons joué au festival un an après la création de Metro Verlaine. C’est à l’Abordage que nous avons vu nos premiers concerts, embrassé des filles pour la première fois. C’était l’épicentre de la ville, son cœur souterrain. Le fait que ce festival ait disparu nous rend orphelins. »

Dans un univers rock qui a tendance à s’aseptiser, à devenir de plus en plus politiquement correct, voilà un groupe qui fait du bien car il assume le côté sale de cette musique : « Il faut retrouver la sincérité du rock, réinventer son esthétique. Cela nous énerve les mecs qui enfilent leurs petits tee-shirts et leurs boots pour redevenir des rockers l’espace d’un week-end. » C’est peut-être pour ça qu’ils ont écrit un morceau comme “Codéine” : « Ce titre ne fait pas l’apologie des drogues. Mais il y a une hypocrisie sur ce sujet en France… Et réussir à écrire un titre sur la drogue sans jamais en mentionner une est sans doute la chose la plus difficile à faire. »

 

EXTRA

Cut up

Cinq ans après la création du groupe, Metro Verlaine sort son premier album. Un disque influencé tant par la new wave anglaise que par la première vague post-punk américaine. Un disque aux sonorités eighties et aux textes incisifs qui font des Normands une belle figure de proue d’un rock lettré et élégant. Le combo réussit de manière subtile et intelligente à marier une musique profondément anglo-saxonne et la langue française. Dès le premier morceau, “Polaroid”, on entre dans leur univers et on s’y laisse bercer tout au long des plages qui composent un premier essai des plus réussis.

 

>> Site de Metro Verlaine

 

Texte : Pierre-Arnaud Jonard

Photo : Christophe Crenel

Cut Up  Hold on

Ballade Sauvage Les éditions des véliplanchistes.

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