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MOCKY

Humain après tout

Mocky © D.R.

Certains disques et discours redonnent du baume au coeur. Celui du Canadien Dominic Salole, alias Mocky, fait partie de ceux-là.

Véritable girouette musicale, Mocky se fait connaître dans les années 2000 du côté de Berlin pour sa musique électronique en dépit d’une formation jazz initiale. À partir de là, il crée le groupe hip-hop de marionnettes Puppetmastaz puis se met à produire (Jamie Lidell, Feist), jouer pour d’autres (Peaches, Gonzales) mais surtout écrire et expérimenter. Son dernier bébé, “Key Change”, inspiré par les méthodes de composition de Duke Ellington ou encore Miles Davis, est un retour bienvenue au jazz instrumental acoustique. Avec juste ce qu’il faut de voix, et surtout une avalanche de cordes, Mocky ne serait-il pas en train d’imaginer la musique de demain?

Au sujet de la métaphore du titre de son album, l’intéressé s’explique : “Cela veut simplement dire que la création requiert une attention humaine. Mais c’est aussi une métaphore qui concerne la musique en général. J’aspire à entendre à nouveau l’humain derrière la musique.” Pourtant, on a l’impression d’entendre de très nombreux passages samplés par les machines. Le musicien s’en explique en précisant qu’il n’y a “que des enregistrements originaux sur l’album. J’essaie d’utiliser la technologie pour apporter plus d’humanité dans le tableau. Je pense que les possibilités sont infinies dans la manière de jouer de nos instruments ou d’écrire nos morceaux.”

C’est un thème récurrent quand on discute avec lui : la place de l’humain et celle de la machine dans le processus créatif. “Utiliser la technologie, mais ne pas être utilisé par la technologie. Sur “Key change” je me sample moi-même, et les musiciens qui jouent sur le disque sont des personnalités à sampler également. Un musicien est un sample éternel lorsqu’il résonne à la bonne fréquence.” Dit comme ça, ça paraît presque simple… “Je crois au style de composition de Duke Ellington où tu écris et arranges en pensant à une personne en particulier. En fait, ce n’est pas tant un apport musical qui est utile mais davantage un style ou une personnalité particulière. Si tu es capable de rire avec quelqu’un, il y a de fortes chances que tu puisses faire de la musique avec lui !”

Tant d’humanisme et de simplicité auraient presque tendance à faire oublier la modernité de ses arrangements. Et quand on l’interroge sur l’avenir de la musique en général, l’artiste le voit ainsi : “Tout va devenir de plus en plus localisé et folklorique. Même si la diffusion sera digitale, le live, qui aura toujours un côté local, commencera à prendre le dessus. Les gens veulent sentir une connexion. À ce moment-là, la musique digitale rencontrera de nouveaux défis qui pourraient s’avérer passionnants. Les gens vont forcément délaisser leur ordinateur. Ce sera un grand jour pour la musique.”

Dernier scoop pour la fin, Mocky confesse, non sans un sourire : “Je ne sais pas si je le ferai un jour, mais j’ai toujours voulu faire un album country. J’aime les histoires et l’imaginaire, un peu comme avec le blues.” L’avenir sera Mocky ou ne sera pas, mais ce “Key change” fixe en tout cas bien le présent.

Texte : Julien Deverre

Mocky - "Key change"“Key change” – Heavy Sheet

www.mockyrecordings.com

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