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BIKINI MACHINE

Bikini Machine ©Raphael Auvray - Longueur d'Ondes 73

Les soixante glorieuses

Éternels habitués du hors-piste, les Rennais de Bikini Machine ont enfin trouvé leur martingale. Ou comment une mécanique rock bien huilée, avec 13 ans au compteur, est devenue l’un des meilleurs groupes hexagonaux de “yeah yeah”.

Découverte des Trans Musicales en 2001, Vieilles Charrues en 2003 et une signature chez Platinum Records… avant même la sortie d’un premier album ! Les Bikini Machine ont toujours su aller plus vite que la musique. Quoi  d’étonnant, donc, de les recroiser ensuite reprenant Jacques Dutronc, se faisant produire par Jon Spencer, remixé par Rubin Steiner, jouant en side project avec Dominic Sonic (pour deux d’entre eux) ou accompagnant Didier Wampas ? Dès leurs premières intros, lorgnant sur la cinéphilie 60’s (l’excellent Bikini theme en 2003), l’urgence communicative et l’insouciance protéiforme se ressentaient.

De cette énergie est restée une ironie distanciée. Un dandysme narquois qui, chemin faisant a su judicieusement préférer l’anachronisme au pastiche. Le virage est palpable sur le single Où vont les cons ? (2009) où les textes parlés croisent esprit taquin, clavier et chœurs chaleureux en anglais. Une réussite. Les BM s’affranchissaient alors des références pour en devenir une. Remplaçant au pied levé, et en plein derby breton, feu les Nantais The Little Rabbits, ex-champions du genre.

2014. Libérés de leurs obligations avec Wampas, les Bikini font leur come-back, sans avoir jamais disparus. Redirection la lumière. Avec un album qui, selon Pat Sourimant (basse, chant, batterie) et Sam Michel (platines, machines, claviers),  « marque un tournant dans [leur] discographie ». Pour cause : « Des textes plus sombres qui touchent à l’intimité, aux doutes », sans jamais se départir de récréations. Notamment parce la « danse n’est jamais loin », tapie dans quelques morceaux. Avec cette même envie de taper du pied ou twister du bassin.

Cette  renaissance sait aussi aller à l’essentiel, un peu à la manière du graphiste américain Saul Bass, « première inspiration de cette nouvelle pochette » et avec qui un rien peut rapidement faire un tout. Sauf qu’ici, « c’est notre chanteur (Fred Gransard) qui a dessiné. » Couleurs douces et passées, personnage énigmatique qui autorise toutes les projections… Les photos pop sont elles aussi bazardées pour se réinventer à base de symboles. À l’image de leurs éternels costards-cravates noirs portés sur scène.

Si, en tout cas, la première écoute nécessite de déprogrammer ses réflexes (combien d’homologues du genre ?), la recette fonctionne dès passée la seconde. Sentez-vous cette démangeaison dans les pieds ? Cette envie de microsillons qui chatouille l’oreille ? N’en jetez plus ! Et c’est sans doute ce qui a aussi convaincu Ford d’utiliser le single Stop all jerk pour sa dernière publicité. Le fun y est palpable. Une formidable opportunité pour le groupe qui voit là un vecteur pour « toucher un peu plus de gens ». Eux-mêmes y découvrant régulièrement de nouveaux confrères. Touchés, à leur tour, d’être désormais « l’arroseur arrosé ».

Rennes est décidément en proie à une éternelle actualité artistique. Prenez pour exemple les festivals, entre le best-of de l’émergence locale du côté de I’m From Rennes, fin septembre, et, trois mois plus tard, les Trans Musicales. « Une fierté » pour les Bikini, intarissables sur la vitalité de leur scène : « Il y a une bonne dynamique avec The Decline !, Sapin, Dragster, Les Spadassins, Sudden Death of Star, The Madcaps, The 1969 Club, Success, l’indétrônable Dominic Sonic (le Dorian Gray rennais) ou encore Soul !, le groupe de notre nouveau batteur Romain Baousson… » De quoi assumer un statut de grands frères ? « Plutôt une motivation » en guise de guitare de Damoclès et « l’occasion de ne plus associer Rennes aux seuls Marquis de Sade et Niagara. » Pourtant, si la ville est dans leur cœur, leur musique reste apatride par ses métissages, lavée de toute identité de territoire. Un constat acquiescé : « C’est vrai que l’on peut s’y perdre. Nous, ce qui nous plaît, c’est de faire ce que l’on veut. » Un choix loin d’être incohérent si l’on prend en compte leurs racines rock, « un style dont on ne connaît pas le père (il y en a plusieurs). Ni même ce qu’il est (en raison des multiples sous-genres). » Pointant l’erreur de puristes qui oublient que le genre est « par définition amené à évoluer ». But avoué : « Faire en sorte que cette musique reste une belle demoiselle curieuse et non un vieux zombie. » Que les Bikini, troquant Vespa contre grosse cylindrée, ont su embarquer.

 

BikiniMachine_BangOnTime - Longueur d'Ondes 73Bang on time !
Yotanka
Il faudra s’y habituer. Les BK font désormais dans le rock de début de soirée, à écouter entre deux vinyles de surf music et guitares UK. Et pour cause : Stop all Jerk, Sulky Lisa, The shade of my soul, Everybody’s in the know et Watch me going by s’écoutent face au soleil, avec les lunettes de rigueur et le déhanché nonchalant. Gagnant en profondeur grâce à l’apport de chœurs. Mais surtout, les Bikini sonnent enfin comme un groupe, et non plus comme une imaginaire bande originale. Ne vous reste plus alors qu’à prendre la pause pour faire le plein de cool… Si si. Groovy, baby !

>> Site de Bikini Machine

Texte : Samuel Degasne / Photo : Raphaël Auvray

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