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VIEILLES CHARRUES

VIEILLES CHARRUES
Du 17 au 20 juillet 2014 à Carhaix (29).

CADRE : centre-Bretagne, par tradition et esprit taquin opposé à la Bretagne littorale (plus connue des touristes). Terre marquée par l’industrie agro-alimentaire, l’élevage industriel (porc, volaille) et la fierté de ses habitants. Quelques milliers d’hectares verdoyants partagés par un festival ogre.

MÉTÉO : bretonne. Ce n’est pas parce qu’il y a canicule que la pluie n’est pas aux aguets…

CARTE D’IDENTITÉ : fête de fin d’année scolaire, créée en 1992, devenu kermesse familiale, puis plus grand festival de musique français en terme de fréquentation (225 000 spectateurs en 2014). Porté par près de 6 000 bénévoles, l’événement est organisé par une association participant au développement régional (création espace culturel, rénovation d’un château, installation d’un lycée en langue bretonne, tremplin musical…).

LA PETITE HISTOIRE : le 14 juillet, les Vieilles Charrues ont remporté la Coupe du monde des festivals, devant le candidat espagnol Primavera Sound.

LES PLUS : l’esprit inimitable breton (entre simplicité, convivialité et levers de coude), la nouvelle scénographie (espaces délimités par des couleurs, mini-grande roue, montgolfière…) et l’éternel chaud-froid éclectique de la programmation.

LES MOINS : l’importance sous-estimée de l’espace Youenn-Gwernig, anciennement « le cabaret breton » et géré par La Fiselerie, malgré son contre-courant nécessaire (programmer des artistes locaux d’horizons musicaux différents) ; la quasi-absence de l’habituelle signature graphique du festival (d’habitude déclinée sur le merchandising et dans les différents espaces – cette année, à quelques exceptions près, il était difficile de voir que le thème était l’heroic fantasy).

LES CONFIRMATIONS : les tape-du-pied Franz Ferdinand, figés dans leur haggis rock toujours aussi bien ficelé ; l’électro tord-boyaux de Gesaffelstein (malgré cette éternelle difficulté d’occupation de scène pour un DJ) ; les générationnels Fauve ≠ et leur journal intime public ; les toujours-aussi-sautillants Skip the Use et Shaka Ponk, éternels cumulards des rassemblements du genre ; l’inhabituelle décontraction d’un Daho plus que souriant (lors de son précédent passage, les photographes avaient protesté contre d’importantes restrictions liées à sa captation) ; la terriblement mature Christine and the Queens, aussi à l’aise en interview qu’en danse sur scène ; et les pas-si-branleurs hip-hopeux de Casseurs Flowters.

LE GRAND MOMENT : étonnamment Stromae. Étonnamment, car lorsque l’on cumule le titre de « nouveau Brel » et succès grand public, on aurait pu craindre le pire. Sauf que le show s’apparente plus à du théâtre qu’un concert. Oui, la foule est acquise d’avance, mais les mises en scène originales (costumes, danses, vidéos…), le corps élastique et fil de fer de l’artiste, puis la sincérité qui s’en dégage restent bluffant et efficace.

LES REVELATIONS : n’oublions pas le tremplin du festival, reconfiguré cette année, et qui a sur trouver trois challengers de haute volée en la présence de Falabella (électro), Totorro (pop instrumentale) et The Same Old Band (rock). Sûr que nous en reparlerons…

LE MOMENT ATYPIQUE : The Celtic Social Club, création des Vieilles Charrues 2014 et collectif d’anciens combattants (Red Cardell, The Silencers …) venu populariser et moderniser certains airs traditionnels (voire, parfois, l’inverse).

LES DECEPTIONS : hormis le ronronnement des Arctic Monkeys (dont le chanteur ressemble de plus en plus à Jesse Garon) et des Black Keys, tous deux passés en mode automatique, elles sont essentiellement techniques : on aurait par exemple préféré un Christophe, impeccable pour l’apéro, sous le chapiteau de la scène Gwernig (plutôt que sur celle principale). Idem pour les Nantais Von Pariahs, qui méritaient mieux qu’une troisième place sur le podium scénique… Enfin, Detroit aurait pu judicieusement profiter de l’obscurité pour donner plus de corps à un show qui a, hélas, rarement décollé. Passer le magnétisme incroyable de son chanteur, et ce malgré une moitié (!) de set consacré au répertoire de Noir Désir, le grand frisson n’a finalement pas eu lieu… Trop d’attente ?

LE MOMENT PUTE : pauvre Elton John, que la nature gâte de moins en moins, le transformant en enfant caché de Benny Hill et Michou… Il faudrait également dire au chanteur d’Indochine (à qui Robert Smith, des Cure, a tout pompé ?), d’arrêter de s’habiller chez Pimkie. Le côté tee-shirt transformé en brassière à chaque levé de bras n’est pas à son avantage. Et que ¾ h de maquillage-coiffage (véridique) pour un effet non-coiffé semble être un mauvais investissement financier… Idem pour l’acteur Jared Leto (mais siiii, le type de « Requiem for a Dream ») venu avec son groupe Thirty Seconds to Mars. En version « Jésus avec une couronne », le pauvre ressemblait à un Raëlien ayant gagné la fève, gâchant son regard blue lagoon par des carreaux fumés. Le tout avec une blouse blanche customisée. On comprend désormais mieux pourquoi…

EN COULISSES : il a fallu expliquer, très gêné, à Arctic Monkeys, que si beaucoup de gens se pressaient dans l’espace artiste, ce n’était pas pour eux, et qu’il était donc inutile de donner suite à leur demande paniquée de plus de sécurité devant leur loge. La raison de l’attroupement était un Bertrand Cantat paradant dans les allées… L’exception culturelle française ?

L’AN PROCHAIN : la 24e édition se tiendra du 16 au 19 juillet 2015.

Samuel Degasne
Photos Denoual Coatleven

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