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DEAR CRIMINALS

DEAR CRIMINALS

L’importance des silences

Petite effervescence depuis la sortie de leur premier EP « Weapons »  à la fin de l’été, réalisé par Philippe Brault (Philémon Cimon, Viviane Audet, Hôtel Morphée, Pierre Lapointe), Dear Criminals semble faire des adeptes avec leur musique sombre, belle et minimaliste. Il faut dire que Frannie Holder et Vincent Legault (Random Recipe) et Charles Lavoie (Lackofsleep, b.a.t.a.l.o.v.e.r.s) n’en sont pas à leurs premières armes !

Rencontre avec le trio pour qui le silence est d’or !

« On ne s’attendait pas à cet accueil. On avait même une blague, où dès qu’il y avait un like de plus sur notre page facebook, on disait : hey, il y a un buzz, il y a un buzz ! ». Il faut croire que le petit projet entre amis a pris plus d’envergure au fil de temps. « On ne pensait pas que cela prendrait autant que cela vu que l’on ne fait pas de la gentille musique pop. Comme la motivation première était juste faire de la musique ensemble, on est très content de la tournure des choses. Mais on a fait très peu de concerts en fait, on en a même fait plus en France qu’au Québec ! ». En effet, le groupe a eu la chance de faire six dates en France, une bonne occasion de roder son show. « On avait fait trois ou quatre chansons ensemble, et on les trouvait vraiment belles, on trouvait qu’elles méritaient de trouver leur public, on avait tous des moments plus creux dans nos autres projets, alors on s’est investi là dedans. »

La force du trio est sans doute l’ambiance très cinématographique dans laquelle il nous plonge. Derrière une musique très simple, on retrouve l’harmonie des voix de Frannie et Charles, qui se mêlent à merveille. « On savait qu’il y avait quelque chose qui se passait entre nos voix et qu’avec Vincent cela avait toujours cliqué musicalement. Il n’y a vraiment pas eu de surprise. C’est assez impulsif ce que l’on fait, autant la musique que les paroles, on ne réfléchit pas vraiment pendant des heures. ». L’autre élément qu’a mis curieusement en lumière la grand-mère de Vincent, ce sont les silences : « Elle nous a dit que l’on jouait tellement bien les silences, ce qui est drôle parce que c’est quelque chose justement que tu ne joues pas. C’est important, elle s’est rendu compte de cette force. Car on veut toujours faire plus, mais parfois s’arrêter à ce qui est vide, jouer avec cette gamme d’émotions-là, c’est ce que l’on peut aller chercher. On n’a pas de balises, surtout sur le premier EP, on pouvait vraiment aller où on voulait, autant dans les petites chansons avec le ukulélé, qu’avec des chansons qui avaient plus de construction. C’est pour cela que le silence nous ramène toujours à faire quelque chose d’assez simple. »

Côté textes, ce sont Frannie et Charles qui s’y collent. Là encore, on se retrouve dans un univers assez dur, ou les relations humaines et l’amour sont loin d’être tendres. « Si on parle de l’amour, c’est sous forme de batailles, ce n’est jamais joyeux. C’est beau et agressif. Mais il ne faudrait pas non plus prendre au pied de la lettre tout ce que l’on écrit. On n’est pas des personnes qui tombons dans le mélodramatique dans la vie en général, on n’est pas des gens torturés. La musique est un moyen qui permet d’aller beaucoup plus loin, beaucoup plus trash que ce que l’on vit, c’est au point où tu aimerais parfois vivre ces instants de noirceur, mais ta vie ne te le permet pas. C’est comme quand tu es en peine d’amour, n’importe quelle chanson d’amour que tu entends de Bon Jovi à Mitsou, tu sens vraiment que cela te parle, donc en ayant des paroles tristes ou sombres, généralement tout le monde va avoir quelque chose à aller chercher là-dedans. C’est le constat, les chansons tristes touchent plus les gens que les chansons joyeuses ! ».

DEAR CRIMINALSAvec la progression du groupe, on pourrait penser qu’il est prêt à signer avec une maison de disque, mais là encore, les Dear Criminals ont un avis bien trempé sur la question : « La seule grosse équipe qui nous tenterait cela serait quelque chose de complètement fou, comme par exemple le label de James Blake en Angleterre. Quelque chose d’en dehors de la scène québécoise. Même si on apprécie énormément le travail des labels indie d’ici, aujourd’hui, en 2014 pour ce que nous voulons faire, et la façon dont on veut le faire, je ne pense pas qu’un label serait intéressé à travailler avec nous. Pour le premier album, on voulait aussi un EP, car ne savait pas trop où on s’en allait, on ne voulait pas tout de suite mettre le gros paquet : vidéoclip, promo, séance photos… On a vraiment fait le strict minimum pour juste voir si cette musique-là pouvait prendre vie, puis si cela nous irait encore dans six mois, car c’est toujours un gros investissement financier à chaque fois. »

Le mot d’ordre semble être « doucement mais sûrement » pour le groupe, qui va tout de même avoir ses prochains mois assez chargés : « On enregistre l’autre EP fin mars. On ne voulait pas nécessairement sortir tout de suite un album, on préférait continuer à écrire des chansons pour sortir des EP régulièrement, parce que le trip c’est d’être toujours en projet d’écriture. Oui cela devient plus sérieux, mais reste que l’on y va doucement. À la place de mettre un gros bloc de béton, essayons de voir comment faire différemment sans s’user. Mais il est sûr que l’on a des envies d’explorer autour de ce projet-là, donc on va commencer à enrober un peu plus le concept, travailler le visuel, on pense à un vidéoclip également. Pour nous c’est important de rester actif. Pas nécessairement sur la scène tout le temps, ni en studio tout le temps, mais juste continuer sur un rythme de spectacle et création de musique. »

Difficile donc de prioriser ses objectifs, quand on a trois créatifs allumés qui débordent d’idées : « Le plus gros travail ressemble un peu à ce que l’on essaie de faire avec le silence. On est trois personnes qui rêvons de choses qui se ressemblent, mais on a aussi nos propres zones que l’on aimerait bien explorer. Et comme on est un petit projet, avec pas nécessairement la plus grande équipe ou les plus grands moyens, il faut quand même que l’on cible nos buts. C’est cela le plus gros travail : revenir aux objectifs immédiats, à court ou moyen terme, resserrer l’instant créatif ! ».

Yolaine Maudet
Photos : Toma Iczkovits

Weapons (autoproduit)
1er mars au Lion d’Or (Montréal) et en tournée au Québec

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