Soirée Pépinière du Krakatoa

Le Glazart (Paris) – 12 septembre 2013
Sous les pavés, la plage du Glazart… A moins que la météo n’en décide autrement ! Soirée humide oblige, on oublie le sable et les parasols pour s’abriter sous les paillotes et dans la salle chauffée. A Paris, l’été touche à sa fin ; les Bordelais n’y pourront rien.

Même si le soleil n’est pas rentré dans la soute, c’est en bus de tourisme que la Pépinière du Krakatoa débarque d’Aquitaine. Parmi ses passagers, la nouvelle scène de la région. Voilà désormais 20 ans que le dispositif mis en place par le lieu de concerts bordelais accompagne les jeunes groupes des alentours pour favoriser leur progression. Et en guise de 20ème anniversaire, la Pépinière s’exporte à Paris.L’heure de la récolte a sonné. Premier germe de la soirée ? Bengale. Le quatuor envoie d’emblée son hip-pop bien à lui avec un inédit sucré et remué : “Vodka Pomme”. Comme sur “Manhattan”, les textes de Mickaël sont denses et osés, bercés par le rap français. Eclectique, Bengale met le cap sur d’autres horizons avec “Ocean Sun”. Plus délicat, beaucoup plus pop mais encore plus attachant. On craque pour les choeurs relevés de Marine et sa touche funky : une véritable bouffée d’air frais. Le set respire. Il oscille entre les passages slow-tempo, soutenus par de beaux claviers éthérés, et les interventions chantées ou parlées d’un Mickaël maniant le spoken-world à son aise. La basse est quant à elle toujours impeccablement calée sur les séquences rythmiques. Ni vu ni connu, Bengale s’essaie maintenant à une version bobo de “Je danse le mia” qui malgré la guitare chatouilleuse, n’enflamme guère le public. Certainement à mettre sur le compte de vieilles rivalités parisiano-marseillaises… Y aurait-il trop de supporters du PSG dans la salle ? Le concert s’achève avec l’entêtant “Dernier Tramway”, d’une simplicité frontale. Faciles sur scène, les Bordelais se lâchent et font durer. En multipliant ce genre de prestations décomplexées, Bengale va secouer la pop française. Un groupe à suivre : “Comme tuer”, mixtape gratuite, paraîtra cet automne… avant un bel album prévu pour début 2014.

Après une courte pause, Be Quiet prend le relais. Dans le style le plus post-punk qu’il soit, les 5 Bordelais font tourner de lourdes lignes de basse enrobées de nappes de synthétiseurs new-wave. Le rendu sonore frôle la perfection ; le public est envoûté. Sur “Trees for Seas”, les envolées noisy du guitariste font mouche. Fidèle à la noble tradition shoegaze, Louis ne lèverait pour rien au monde ses yeux cachés derrière de longs cheveux noirs : trop occupé à maîtriser son instrument, il bricole en permanence ses effets et répète inlassablement les allers-retours entre pédales et ampli. Un style équivoque qui rappelle l’immense Joshua Hayward, guitariste du groupe britannique The Horrors, avec qui il partage le modèle de guitare (Fender Jaguar à vibrato)… et la coupe de cheveux. Une influence totalement assumée, nous a-t-il assuré. Quand vient “Zelda”, les derniers doutes sur le génie technique des Bordelais sont levés. Au gré d’un interlude musical, Be Quiet nous transporte dans un crescendo cosmique relevé par le solo magistral de Louis, accroupi sur son panneau, ou plutôt son mur de pédales. Le Glazart bascule dans un film de science-fiction et finit par décoller lorsque la section rythmique revient pour reprendre le tout. La grosse caisse transperçante fait exploser la salle. Le set se termine par “Infancy” et son superbe refrain clair-obscur, puis par l’inédit “Gotham”. A seulement 18 ans de moyenne d’âge, Be Quiet n’a pas fini d’impressionner.

Plus de concerts, mais des DJs avec les sons de Dorian and The Dawn Riders puis d’une autre formation bordelaise, Archipel, pour la toute fin de soirée. Archipel qui vient tout juste de réaliser une vidéo live et exotique de leur dernier titre : “Seawater”.