Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Rubin Steiner

Rubin Steiner reste dans l’ombre l’une des meilleures choses qui soit arrivée à l’électro français ces quinze dernières années. Le musicien et DJ de Tours a sorti ces jours-ci « Discipline in Anarchy », son septième disque (voir Longueur d’Ondes n°65). Rencontre à Toulouse, quelques heures avant un concert béton, heureusement aux antipodes de sa préparation un peu swing. Mais chut, on laisse la parole -libre- à Frédérick Landier, alias M. Steiner…

Sur « Discipline in Anarchy », il y a des claviers et un son plutôt froid. On a la sensation que tu as fait une cure de Kraftwerk et tu as composé ce disque ensuite…

Non, non, non, pas du tout. En fait, c’est une histoire de temps et de moyens. Ça fait presque deux ans qu’on gère une salle de concert, « Le temps machine » à Tours, et que j’en suis le programmateur. Ça me fait une sorte de vrai métier mais voilà, ça prend du temps. Il a donc fallu que je me concentre sur une manière simple de faire de la musique chez moi. Puisque je n’ai jamais eu de studio, les synthés c’était pratique.

Quelle a été l’idée directrice de ce disque ?

Sur les disques d’avant, j’avais voulu faire sonner les machines comme de vrais instruments, là, je me suis dit que j’allais faire sonner les machines comme des machines. C’était plus une économie de moyens par rapport au temps -10 minutes par semaine…- et à place que j’avais chez moi pour faire de la musique, c’est-à-dire… pas de place ! Même s’il y a des guitares, de la basse et de la batterie sur certains morceaux, ça a été principalement du synthé, de l’ordinateur et de la boîte à rythme.

Il y a des références à la musique électronique allemande des années 70, mais dans l’ensemble, la couleur de ce disque est assez années 80.

Je ne trouve pas parce que je déteste les années 80, en général. Joy Division, Dépêche Mode, Cure, Suicide, tout ça, d’accord, mais l’électro hyper typé 80, je déteste. Vraiment ! Quand je pense aux années 80, ça m’évoque celles que j’ai vécues et que je n’ai pas aimées. Dans ces années-là, moi, je faisais du skate et j’étais un punk. J’étais à la fois dans Ludwing von 88, les Bérurier Noir et à fond dans Black Flag, Minor Threat, tous les groupes de punk ricains. C’était la musique des vidéos de skate et il ne fallait surtout pas me parler de ces saloperies de synthés pourris, à part ceux de Cure et de Joy Division, qui étaient jolis. (Grand sourire)

Tous les disques de Rubin Steiner sont très différents. Ils touchent à l’électro, au vieux jazz, au rock, à la pop, au hip-hop et parfois, aux musiques tropicales. Pourquoi passer à chaque fois d’un style à l’autre ?

Comment expliquer ça ? Il y a une vingtaine d’années, on était toute une bande de potes à faire des fanzines, de la radio et à chaque fois, il était hors de question de faire une différence entre Earth, Wind and Fire, la musique expérimentale, le krautrock et l’électro. C’était de la musique, point. Aujourd’hui, tous ces potes sont tourneurs, directeurs de salles de concerts, journalistes, etc… ils ont continué à faire des trucs dans la musique avec le même esprit. Ne pas avoir d’œillères, c’est quand même beaucoup plus intéressant. Tu ne vas pas aller bouffer au Mc Do tous les jours.

Ton quotidien de programmateur, comment ça se passe ?

Dans les années 90, j’organisais déjà plein de concerts et c’est quelque chose qui m’éclate. C’est comme faire des compils cassette à sa chérie, sauf que là, tu les fais en concert. Après, les goûts, c’est une autre histoire. On a de la musique tout le temps dans les oreilles et au bout d’un moment, tu arrives à reconnaître la bonne musique de la mauvaise. C’est peut-être mal de dire ça, sauf que bon… On reçoit 50 000 mails par jour, des disques et des machins et y’a 90 % de merdes. A un moment, faut juste expliquer aux gens que « Non, ça le fait pas » et voilà. C’est pas parce qu’on aime la musique, qu’on doit tout aimer. Moi, j’aime plein de trucs mais j’ai quand même des goûts… affirmés.

Le disque qui se casse la figure, l’industrie musicale qui mise tout sur les concerts. Comment vois-tu ces changements ?

Déjà, le disque, c’est cher. Et puis, il y a de plus en plus de musique tout le temps, partout. Les Soundcloud, les Myspace, tout le monde poste de la musique sur Internet. A un moment, t’es juste obligé de faire des choix, et dans tous les domaines. Moi, je sais que j’ai pas d’ambitions particulières dans la musique. Être célèbre, je m’en fous, vendre des disques, je m’en fous, faire des concerts, c’est cool. On fait des concerts super mal payés voire pas payés du tout, on doit jongler avec ce qui se passe à la salle, parce qu’on y bosse tous, mais les concerts, c’est pour le fun.

Le mot de la fin ?

J’ai la grippe, l’ampli basse est cassé, elle démarre mal cette soirée. En plus, sur scène, normalement, on est quatre, et ce soir, on est trois. Le quatrième, qui joue des congas et des percus n’est pas là et p….n, ça nous manque. En revanche, notre batteur a un projet qui s’appelle The Dictaphone, c’est du garage punk ultra-violent et ce soir, il joue de la disco. Ce genre de grand écart me fait vraiment bien rigoler.

Bastien Brun

ARTICLES SIMILAIRES