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Fumuj


Trouver une logique entre le studio et le live, retranscrire fidèlement l’énergie des concerts sur CD, c’est le défi que se sont lancés les Tourangeaux de Fumuj avec leur troisième album, sorti en novembre dernier. Le quintette y affirme nerveusement son versant rock-fusion, auparavant plus présent sur scène que sur disque. A l’occasion du lancement officiel ils sont passés par la Goutte d’Or de Barbès, tester l’impact de leurs nouvelles compositions ainsi que de leur installation sensorielle, devant un parterre de fans et de professionnels. Rencontre en coulisses quelques heures avant le verdict.


“Drop a three”, votre troisième album vient de sortir début novembre. Comment est-ce que vous le définiriez ?

Romain (batterie / programmation) : C’est la synthèse de tout ce que l’on a pu faire avec le groupe depuis 2005. Il a une énergie qui est proche de ce que l’on fait en concert. Il est plus live. Ca vient peut être de la présence de Pierre, notre MC en studio. On lui avait envoyé les maquettes sur « The robot and the Chinese shrimp ». On s’est aussi beaucoup découvert en live sur les dates que l’on a pu faire pour le second album. Le pendant rock-fusion était déjà présent sur cet album mais cette fois-ci, avec Fred Norguet à la production, on a pris le parti de ne pas partir dans tous les sens. Le but était de trouver un son pour l’ensemble de l’album, pas pour un titre.

Ce parti pris pour un son plus rock-fusion veut-il dire que vous laissez de côté l’électro-dub de « The robot… » ?

Romain : A la base, on a une formation basse / batterie / guitare et on a énormément écouté de rock. Et puis sur scène, l’énergie est là ; et comme on est plus sur un processus privilégiant l’énergie, c’est fatalement rock. La cohésion en live a rendu l’alchimie évidente. Il y a aussi que les machines avaient pris un côté contraignant en live. Tu ne pouvais pas arrêter la programmation si tu avais les gens qui pétaient un boulon et tu sentais que l’on pouvait les emmener encore plus haut. C’était frustrant et cette fois-ci, on voulait garder la main mise.

« Play or die » sonne Rage Against The Machine et « Soul cling » est très electro. Cet album était-il un moyen de laisser libre court à certaines influences ?

Romain : « Soul cling » est une dédicace à Soulwax (la formation rock du duo belge 2 Many Dj’s, ndlr). On avait vu leur live et le mélange électro / rock marchait à fond. On ne se dit pas « on va faire un style », on suit nos envies. D’ailleurs sur nos derniers live, on avait un passage électro voire techno de 10-15 minutes. Par exemple, toute proportion gardée, un groupe comme Fishbone a fait plein d’albums dont certains n’ont rien à voir avec les autres. Pourtant, c’est toujours le même groupe, il y a toujours l’esprit. Quand on aura fait cinq ou six albums, la seule chose dont je serai fier c’est que l’on ait toujours suivi ce que l’on voulait faire, avec un esprit Fumuj. Il y a le dub Fumuj, le rock Fumuj et si ça se trouve, notre prochain album sera un double CD de dub ou bien quelque chose à base de machines uniquement…

Vous avez changé de label pour ce nouvel album. Était-ce une volonté de votre part de vous écarter de l’étiquette électro-dub de Jarring Effects ?

Romain : On connaît les Jarring depuis le début du groupe. Le premier album avait été enregistré chez eux. On vivait même chez eux à ce moment-là. Et puis on a beaucoup tourné avec les Ezekiel, High Tone, Brain Damage et toute la scène autour de JFX. Si ça ce ne s’est pas fait sur cet album, c’est juste qu’ils ont fait des choix artistiques et les conditions financières n’étaient pas évidentes pour eux. De notre côté, on s’est aussi dit qu’il y avait trop de guitares sur cet album. C’est peut-être une parenthèse mais cela dit, on est très heureux d’être chez Clean8 / Dirty 8 car la relation est pleine de fraîcheur.

L’autre gros volet de votre rentrée, c’est aussi l’idée que vous avez eu d’adapter votre concert pour les personnes malentendantes. Comment ça vous est venu ?

Pierre (Mc Miscellaneous) : L’idée vient de la salle l’Astrolabe d’Orléans. Elle nous semblait originale au début et puis comme on disait que notre musique rendait sourd, on s’est dit qu’on allait essayer de rattraper le coup. On s’est pris au jeu. On a fait pas mal de rencontres, beaucoup d’essais, d’expérimentations tout en essayant d’ouvrir tous les sens, entre autres via la somesthésie (ensemble des perceptions de l’homme via notamment la peau et les organes internes, ndlr). On nous a parlé de précédentes expériences réalisées dans le théâtre ou l’art contemporain. L’Astrolabe nous a mis en relation avec des structures dont l’IRESDA (Institut Régional pour Sourds et Déficients Auditifs d’Orléans) et à partir de là, la réflexion est partie. C’est génial aussi car c’est un projet qui nous fait rencontrer plein de gens. On va bientôt faire la connaissance d’une femme qui traduit les battles de MC’s anglais et américains en langage des signes ainsi qu’un slammeur sourd.

Comment cela se traduit-il sur scène ?

Romain : On a des récepteurs, sorte de petits boudins en plastique gonflables, avec lesquels on ressent les vibrations par la pression de l’air. On a aussi des cheminées en salle avec des transducteurs, de petits haut-parleurs, qui vibrent également. La vidéo est quant à elle synchronisée sur le son en direct. C’est notre jeu qui la déclenche, les fréquences de la voix de Pierre ou l’intensité de ma frappe à la batterie par exemple. On ne voulait pas faire de la vidéo pour faire de la vidéo. Yan d’Ezekiel avait mis la barre tellement haut ! Il n’y a pas de message précis, ça permet juste de donner d’autres infos sur notre musique aux malentendants, qui peuvent suivre visuellement ce qui se passe rythmiquement. Pour le moment, nous en sommes encore à la version 1.0. Il y aura constamment des modifications à apporter sur l’installation. Ça se fera au fil des dates.

Quel est l’apport pour les personnes qui n’ont pas de problème d’audition ?

Pierre : Cela permet de sensibiliser les entendants au monde des sourds et de ressentir la musique de la même façon qu’eux. On voulait aussi leur faire vivre quelque chose d’époustouflant. Le set est en tout cas à 95% ce qu’il aurait été normalement.

Cette structure est-elle faite pour l’ensemble des salles et des festivals ?

Romain : On a bien fait attention à ça. On peut tout porter, transporter dans le camion et installer ça dans les salles, même de 100 ou 150 personnes. Seul Steve, notre tour manager, et nos techniciens ont un peu plus de taf en installation.

SITE : www.myspace.com/fumuj

Damien Baumal

Photos : Yannick Ribeaut

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