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Chloé Mons

ChloéMons

Madame fait rêver

Le nouveau disque de la pin-up au ukulélé est un camaïeux crépusculaire où le blues ne flirte pas innocemment avec le punk. Rencontre avec une barbie-doll à haut potentiel spirituel.

On pensait tomber sur un personnage un peu schizophrène, un mix entre Dolly Parton et Nina Hagen en mode provoc’, mais Chloé Mons est à des années-lumière de cela. La blonde est une personne entière et sincère,  exactement à l’image de son deuxième disque : “”Par la rivière” est fidèle à ce que j’avais en tête. Il peut plaire ou pas, mais moi, c’est comme ça que je l’aime.” Chloé est d’un bloc et sa musique est comme elle : pas facile à appréhender. Pour les autres, c’est peut-être perturbant, mais elle est à l’aise avec toutes les facettes de son « moi » et ne manque pas d’ironie à son égard. Exit donc, l’idée de provocation gratuite.

Chloé Mons a deux sœurs spirituelles : Courtney Love et PJ Harvey. Celle qui se réclame aussi de Calamity Jane, l’indienne blanche, a voulu que “la country et le punk fasse l’amour” sur un même disque. On ne pourrait mieux résumer ces quatorze pièces mutantes, lo-fi et crépusculaires. Cet opus explore ainsi tous les états d’un blues sec et rugueux comme les déserts de l’Ouest américain. La « rivière » passe aussi par de grandes prairies apaisées, mais il y a aussi des torrents électriques, des cascades soniques, quelques hurlements et beaucoup de silences. Quelques morceaux nous invitent en territoires indiens pour participer à des cérémonies chamaniques. Cette part d’expérimentation, Chloé Mons la revendique : « Cela me semble naturel, mais je ne me dis pas que je vais faire de la musique expérimentale. Mes chansons sont comme des larmes qui sortent toutes seules. Je laisse une grande part à l’instant.» Car elle est comme ça, Chloé : instinctive et émotionnelle.

“Les émotions ne sont pas blanches et noires”, relance-t-elle en guise d’explication. Nous sommes effectivement sur un camaïeu de bleu nuit, de mauve, d’orangé, avec quelques lueurs jaunes. Une aurore ou un crépuscule, selon l’humeur, mais toujours entre chien et loup. C’est aussi l’heure des intentions sexuelles. Les paroles de « I can feel the whore in me » sont à cet égard éloquentes : « J’assume le fait d’être une femme qui se connaît et qui connaît ses désirs. Cette chanson, c’est aussi une déclaration d’amour à la vie ; j’y parle du corps, de l’amour physique. Les femmes aussi ont le droit d’en parler, non ? »

« Par la Rivière » a été conçu l’an dernier avec son complice Yann Pechin : “Je dis que c’est mon frère car nous sommes en osmose musicale complète.” L’enregistrement sera lo-fi : « Les maquettes étaient prêtes, nous avons ensuite rajouté un peu de banjo, quelques claps et quelques voix, mais rien de plus. Par contre, le choix des instruments et des micros a été très soigné.” Cette idée d’artisanat de la musique va bien plus loin car c’est une autoproduction totale, de l’enregistrement jusqu’au pressage. Et c’est Miss Mons qui s’est occupé de tout ! Seule nouveauté par rapport au premier effort : un deal de distribution avec Universal qui lui permettra d’être présente – et visible – en magasins, même si les ventes se font essentiellement via son site Internet ou en direct, lors des concerts. « C’est dur, mais l’autoproduction m’offre une liberté artistique totale. J’en suis fière. »

Et sur scène ? Une tournée prend forme. Et si l’on a pu voir Chloé en première partie d’Alain Bashung dans les salles les plus prestigieuses de France ces dernières années, elle ne se la joue pas diva pour autant : elle se produit tout aussi bien dans de petites salles, faisant le show toute seule armée de son ukulélé rouge…Pour faire taire les ultimes réticents, on lui laisse le mot de la fin. « Ce disque, écoute-le avec ton ventre, avec ton cœur. Après, tu as le droit de ne pas aimer. Mais écoute-le ! » Unique, on vous dit.

www.chloemons.com

Eric Nahon

Photo Patrice Normand

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