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Bumcello


Le groove solaire

Alerte ! Le duo sensationnel Atef / Segal frappe encore très fort. Bumcello revient sous des couleurs soul et funky. Leur “Lychee Queen” est acidulée et juteuse. Slurp !

“Groove (n.m.) : En anglais, signifie “sillon”. Le verbe “to groove” peut se traduire par s’amuser, s’éclater. Dans la musique populaire, le terme groove s’applique en premier au rythme, un terme utilisé en référence à la mesure et l’embellissement des sections rythmiques. En d’autres termes, le groove est une sensation et une dynamique spécifique appliquées à un motif rythmique régulier.” Pourquoi commencer un article par cette définition tirée de Wikipédia ? Pas pour jouer aux rockologues érudits, mais parce que l’essence de Bumcello, c’est exactement ça : un groove, une alchimie bien particulière que l’on reconnaît à la première pulsation. Sur ce canevas, Cyril Atef et Vincent Segal tissent et brodent leurs motifs s’inspirant de sons d’orient, d’occident et de plus loin encore si ça les chante. Mais on retrouve toujours dans leur musique aventureuse cette délicieuse petite sensation, aussi excitante que… hum, que vous savez quoi.

Avec Bumcello, c’est un peu comme si c’était toujours la première fois, mais en meilleur ! Pour le sixième volet de leurs aventures (troisième album studio), le batteur qui tape sur tout ce qui ne bouge pas et le violoncelliste électrique, ont convoqué un son “West Coast” aux confluents de la soul, du hip hop et du jazz, avec toujours cette dynamique rock et des sons électro. Cela vous paraît fouillis ? Ca ne devrait pas. “Lychee Queen” est le disque le plus solaire et le plus cohérent de Bumcello. Sur la pochette : une ravissante jeune femme avec une perruque afro rose. Si l’on y regarde de plus près, on se rend compte que la perruque est en fait un litchi. “J’aime ce fruit. C’est dur à l’extérieur, mais quand tu l’ouvres, c’est succulent et moelleux, le geste est presque sexuel”, décrypte Cyril Atef dans un grand sourire. “Vincent l’a associé à Queen, et voilà !”

Ainsi naissent les mythes… Le percussionniste frugivore chante également sur plusieurs morceaux et il prévient dans “Bakin’ in the sun” : “Bumcello’s ready to have fun”. Et de fait, ce disque est beaucoup plus joyeux et plus lumineux que son prédécesseur “Animal sophistiqué” : “Nous voulions faire un album assez soul et plus doux”, explique le groupe. “Les sonorités West Coast viennent du fait que nous avons des attaches à L.A. On y a enregistré et mixé. L’album est un mélange d’énergie parisienne et de sons californiens.” Le pote Tommy Jordan chante sur le premier morceau et ça sonne un peu comme du Shuggie Otis… Le genre de titre que l’on aurait envie d’entendre en boucle sur Radio Nova. On entend aussi les rappeurs de Blackalicious ou Chocolate Genius. Mais ce n’est pas un disque hip-hop. Pour preuve le génialoïde “Eurostar”, chanté par le brillant Magic Malik qui délaisse sa clarinette pour l’occasion. Malik grimpe dans les aigus, se prenant pour un dieu du glam-rock ; cette voix haut perchée contraste avec un texte tranchant est engagé. C’est le poétique Vincent Ségal qui est sorti de son habituelle réserve artistique pour écrire ce brûlot inspiré par les sans-papiers qui squattent les abords du tunnel sous la Manche. Ce titre enthousiasmant est l’un des sommets excentriques de l’album. Dans le titre funk “No enemies”, Chocolate Genius insère des sons tirés des émeutes de Los Angeles… Chez Bumcello, on oscille toujours entre le politique et le poétique.

Segal et Atef construisent un univers inspiré à la fois de la théorie du Big Bang et des trous noirs : toujours en expansion et avalant tout ce qui lui tourne autour. Sur “Assiko mintana”, le duo joue avec Mama Ohanja : “Il nous a beaucoup appris sur le bikousti, un des nombreux style du Cameroun. C’est de la pure transe !” Cyril s’excite sur ses percussions pendant que Vincent joue de son violoncelle électrique comme d’une basse. Le premier vient du punk, le second du classique. Leurs caractères radicalement différents fusionnent sur chaque morceau pour engendrer une musique complètement libre qui ne reconnaît aucune frontière (sauf celle du bon goût). “Des fois, on casse le groove pour entrer sur un terrain très expérimental, surtout en live”, analyse Cyril. Le laboratoire expérimental des musiciens n’est pas fait pour les pédants ou les analystes. Si ces professeurs nimbus cherchent l’accident, c’est avant tout pour amener du fun à l’auditeur. Du chaos naît le beau. Sur scène, Bumcello improvise et ne joue quasiment jamais ses compositions. Le duo n’a même plus besoin de se regarder pour se comprendre, tout se fait à l’écoute… On se sait jamais ce que l’on va écouter et les musiciens savent à peine ce qu’ils vont jouer. On sait juste que l’on va prendre un pied monstrueux à vibrer au gré de leurs élucubrations musicales. Aucun concert ne ressemble à un autre. Sur “Lychee Queen”, Bumcello renoue parfois avec cette heureuse habitude scénique. Sur “Hey hey hey hey hey”, Vincent Segal commence par une pièce contemporaine jusqu’à ce qu’Atef rentre dans le morceau avec un bon beat funky : “Nous avons repéré quelques lignes mélodiques qui nous plaisaient en concert pour construire un morceau qui montre ce que l’on fait en live.” Bilan des courses ? Ca finit en samba expérimentale !

Mais comme toute règle a son exception, le prochain événement live de Bumcello aura lieu le 11 septembre à la Grande Halle de la Villette, à Paris. Le groupe sera sur scène entouré des musiciens présents sur l’album et, fait ô combien historique, jouera ses morceaux tels quels, en compagnie de Tommy Jordan ou Chocolate Genius. On peut leur faire confiance pour nous réserver cependant quelques surprises assorties d’improvisations géniales. On ira avec eux non pas croquer la pomme, mais laper ce délicieux litchi…

Eric Nahon

“Lychee Queen” – Tôt ou Tard

www.bumcello.com

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